Ce sont des publications croisées sur Facebook : un garçon et sa grand-mère, fichu immaculé sur la tête, regardent des gâteaux trônant sur la toile cirée. Des posts plus loin, c’est une mamie supercentenaire qui présente son crochet, ou encore une jolie bergère en tenue de camouflage qui regrette, depuis son pré, « qu’[elle] n’obtiendra jamais autant de “J’aime” que Lady Gaga ».
Tous demandent des « félicitations » et « évaluations » pour leur travail. Ils en reçoivent plein des internautes dont un grand nombre ignore que ces personnes n’existent pas : chacune de ces photos a été générée par intelligence artificielle (IA).
Ces publications se multiplient en ligne et sur le réseau social de Meta, dans des pages spécialisées dans le « piège à clics ». Baptisées boomers traps (« pièges à babyboomers »), elles « jouent sur la crédulité et l’émotion, cherchent à toucher la corde sensible » des internautes,
« Ces pages, en surfant « sur la nostalgie, “c’était mieux avant” », visent les seniors : des fausses photos anciennes, des montages comparant de faux couples à leur mariage puis cinquante ans après, ou encore beaucoup de fausses images de fêtes d’anniversaires ou de travaux manuels »
Sites remplis de publicités
Ces espaces partageant du contenu de piètre qualité amassent des centaines de milliers d’abonnés. Leurs créateurs administrent des groupes de discussion pouvant rassembler plus d’un million d’inscrits.
Leurs administrateurs font partie d’un tout autre business : celui de l’achat et vente de trafic vers des sites Web. Il s’agit ainsi de groupes organisés, parfois de salariés d’une entreprise qui cherche à camoufler son origine.
« Monde des idées », se présente comme une page gérée depuis la France, avec une adresse postale à Gap (Hautes-Alpes). En réalité, les contenus qu’elle publie pour ses quelque 90 000 abonnés sont mis en ligne depuis l’Arménie, comme le montre l’outil de transparence de Facebook. Le Monde a pu retrouver une dizaine de pages comparables, toutes gérées depuis l’Arménie malgré leurs adresses françaises fantaisistes et publiant exactement les mêmes contenus. L’entreprise arménienne qui semble administrer toutes ces pages n’a pas donné suite aux sollicitations du Monde.
sources : JP D. , Le Monde
photo : D.R.