L’Arménie se protège de l’Azerbaïdjan
L’Arménie ratifie le statut de Rome de la Cour pénale internationale malgré l’hostilité du Kremlin
Erevan, qui justifie sa décision par le fait de se protéger de l’Azerbaïdjan, se voit désormais dans l’obligation, en théorie, d’arrêter Vladimir Poutine en cas de visite sur son sol et de l’extrader vers le tribunal de La Haye.
L’Arménie avait prévenu qu’elle irait jusqu’au bout malgré l’hostilité de la Russie.; le Parlement arménien a ratifié le statut de Rome, traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI), qui a émis, en mars, un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine. Les élus se sont prononcés à 60 voix pour (22 contre). Avec cette ratification, Erevan se voit donc dans l’obligation, en théorie, d’arrêter le président russe s’il se trouve sur son sol, et de l’extrader vers le tribunal de La Haye.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a dénoncé une décision « erronée », et a dit douter que cela soit « correct du point de vue des relations bilatérales ». Il a dit que l’Arménie n’avait « rien de mieux » que l’alliance avec Moscou, tout en condamnant de nouveau le mandat d’arrêt, jugé « illégal », émis par la CPI contre Vladimir Poutine ainsi que la commissaire russe aux droits des enfants, Maria Lvova-Belova, pour crimes de guerre liés à la déportation d’enfants ukrainiens en Russie.
Le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, avait insisté que cette ratification ne visait pas la Russie, mais qu’elle était nécessaire pour avoir la garantie que son pays soit protégé par le droit international face à l’Azerbaïdjan. Bakou a remporté, le 19 septembre, une victoire militaire éclair au Haut-Karabakh, qui a précipité la chute de la République autoproclamée de cette région séparatiste, et l’exode de sa population.
« Garanties additionnelles »
L’Arménie, qui accuse la Russie de l’avoir abandonnée face à un adversaire bien plus riche et mieux armé, s’inquiète désormais pour la sécurité de son propre territoire. Le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, a menacé à plusieurs reprises d’obtenir par la force le corridor de Zangezur, censé relier son pays à l’exclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan (sud-ouest de l’Arménie), et offrir un lien terrestre avec la Turquie. Depuis 2021, les troupes azerbaïdjanaises occupent également plus de 150 km2 du territoire souverain arménien près de la frontière, selon Erevan, ce que nie Bakou.
Rejoindre la CPI « créerait des garanties additionnelles pour l’Arménie » face à l’Azerbaïdjan, a plaidé, Eghiché Kirakosian, un responsable des affaires de justice internationale, . Une potentielle invasion de l’Arménie « relèvera de la compétence de la CPI », ce qui aura un « effet dissuasif ». En visite, mardi, à Erevan, la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, a salué la ratification arménienne. « La lutte contre l’impunité des crimes est une condition de la paix et de la stabilité », a-t-elle déclaré sur X (ex-Twitter).