A Hyères , Villa Magdala : Aïda Kébadian (& sa maman Chouchane, rescapée du génocide) jusqu’au 13 septembre 2023
Aïda Kebadian,
Étrangeté du monde
08.07 > 17.09.23
Le Vernissage a eu lieu le samedi 8 juillet à partir de 16h
en présence d’Aïda Kebadian
sur réservation par mail via contact@villamagdala.fr
Durant l’été 2023, la Villa Magdala accueille les œuvres d’Aïda Kebadian, artiste rare dont les peintures sont habitées par des personnages à la fois graves et tendres, saisis dans des attitudes songeuses, qui semblent hantés par l’exil. D’origine arménienne, « Aïda a la nostalgie rivée à l’âme », elle nous parle d’un ailleurs, un pays hors du temps, où le soleil est souvent rouge.
La Villa Magdala propose une première rétrospective du travail d’Aïda Kebadian en présentant différentes séries de peintures et de gouaches de plusieurs périodes : “Étrangeté du monde”. Autodidacte, elle commence au début des années 1960 à réaliser des gouaches dans la solitude de sa chambre chez ses parents à Colombes jusqu’au jour où son frère Jacques Kebadian les découvre et la pousse à les montrer. Elle fait sa première exposition en 1973 à l’Atelier Jacob-Galerie Hors-les-Normes, célèbre espace parisien soutenu par Jean Dubuffet. Encouragée, Aïda Kebadian enchaîne les expositions et s’envole en 1987 au Mexique dans le cadre de la Villa Médicis – Hors-les-Murs. Son univers onirique s’étoffe de l’esprit sud-américain, de ses rites ancestraux, avec une palette plus vive et contrastante, aspirant toujours à la rêverie.
« Présences silencieuses, obsédantes. Êtres lunaires saisis dans des formes cabossées, des couleurs indécises. » Michel Nuridsany
©Aïda Kebadian, sans titre, huile sur toile
« Chez Aïda il y a des petites filles-hiboux et des garçons-rats qui regardent l’envers des choses… alors que leurs mères les traînent avec une ficelle… » René Schérer
« Au même titre qu’il y a un humour juif, il y a un humour arménien sur fond de génocide et d’expatriation…Le regard d’Aïda est celui d’une Alice au pays des camps de concentration où la terreur se marie avec l’incongru… une peinture qui pince et qui griffe, comme un fou-rire sur un banc d’école de filles. » Guy Hocquenghem
D’un trait naïf, les figures aux grands yeux noirs nous fixent et semblent nous interroger. Qui regarde qui ? Aïda Kebadian, elle-même, l’ignore. D’ailleurs, elle est peu bavarde sur son travail. Elle peint par à-coups et sans idées préconçues. Peindre est, pour elle, seulement une nécessité vitale. Aussi, son geste est spontané, libre, affranchi de toute influence et courant, elle crée un monde imaginaire coloré et peuplé d’êtres vivants, parfois hybrides, souvent campés dans des déserts, des paysages de montagne ou de modestes intérieurs.
À l’étage, un hommage est rendu au travail de Chouchan Kebadian, sa mère qui a commencé à peindre à la gouache à 73 ans pour chasser l’ennui. Initiée par Aïda, peindre était devenu son seul plaisir ; « peindre joyeusement non pour oublier la vie passée et ses tourments, mais contribuer à la joie de vivre », écrit si justement Patrick Bouchain.
L’art brut de Chouchan offre un dialogue surprenant avec les œuvres profondément inspirées d’Aïda.
©Chouchan, sans titre, gouache