L’EPR
Le réacteur pressurisé européen ou EPR (initialement European pressurized reactor, renommé Evolutionary power reactor) est un réacteur nucléaire appartenant à la filière des réacteurs à eau pressurisée. C'est un réacteur de génération III, selon la classification internationale.
Il s'agit d'un réacteur de forte puissance (~1 600 MWe) conçu dans les années 1990 par la co-entreprise franco-allemande NPI (Nuclear Power International), détenue à parts égales par Framatome SA et Siemens KWU. Depuis 2011, l'EPR est développé par les français EDF et Framatome (ex Areva NP), à la suite du retrait de Siemens KWU.
En août 2022, trois EPR sont opérationnels : deux à la centrale nucléaire de Taishan en Chine (Taishan 1 et 2, entrés en service commercial respectivement en 2018 et 2019) et un troisième à la centrale nucléaire d'Olkiluoto en Finlande, connecté au réseau en et dont la mise en service commerciale est prévue pour le premier trimestre 2024. Trois autres EPR sont en construction : un en France à la centrale nucléaire de Flamanville et deux au Royaume-Uni à la centrale nucléaire d'Hinkley Point. Huit autres EPR sont en projet : deux à la centrale nucléaire de Sizewell au Royaume-Uni et six à Jaitapur en Inde.
Une version améliorée est en cours de développement, l'EPR 2, dont six réacteurs sont en projet en France.
Objectif
Le réacteur pressurisé européen, ou EPR (rétroacronyme de Evolutionary Power Reactor)1, est conçu dans l'objectif d’améliorer la sûreté de fonctionnement et la rentabilité économique des centrales nucléaires par rapport à celles dotées de réacteurs de génération précédente. Sa durée de fonctionnement minimum à la conception est de 60 ans.
Dessin de la tranche 3 de la centrale d'Olkiluoto, de type EPR.
Histoire du projet
Intérêt initial de l'EPR
La fin des années 1980 marque le début de difficultés pour l'industrie nucléaire : le contre-choc pétrolier et la catastrophe de Tchernobyl entraînent le ralentissement voire l'abandon des programmes nucléaires dans la plupart des pays occidentaux. L'aboutissement du programme de construction des 58 réacteurs nucléaires français et des réacteurs nucléaires allemands entraîne également un excédent de production électrique, limitant la nécessité de mise en chantier de nouveaux réacteurs. Enfin le ralentissement de l'activité de construction de nouvelles centrales nucléaires fait peser un risque de perte d'emplois important et donc de nombreuses compétences de l'ensemble de la filière nucléaire. L'industrie nucléaire se tourne alors vers l'exportation, un marché où la rude compétition internationale invite à la consolidation des principaux acteurs nucléaires européens, et à la création d'un réacteur commun franco-allemand2,3.
Rapprochement franco-allemand et naissance de l'EPR
Dans ce contexte, le français Framatome et l'allemand KWU (future filiale de Siemens) se rapprochent début 1986. L'objectif est de développer et commercialiser une technologie unique de réacteur nucléaire à eau pressurisée, d'abord pour les besoins des deux pays, puis pour l'ensemble des producteurs mondiaux d'électricité nucléaire. La même année, EDF présente une première esquisse de son réacteur du futur, le REP 2000 (pour « réacteur à eau pressurisée de l’an 2000 »), pour remplacer ceux en fonctionnement à l’horizon 2000-20154. Si ses caractéristiques sont encore à préciser, EDF l’imagine « évolutionnaire » et non « révolutionnaire ». Il s’agit d’optimiser et d’améliorer les paliers précédents par des progrès dans la sûreté, la puissance du réacteur, les coûts de production ainsi que l’utilisation de l'uranium5.
Le , un accord de coopération entre Framatome et Siemens est signé et voit la création d'une compagnie commune, Nuclear Power International (NPI). Cette dernière a pour but la conception d'un « Produit Commun » correspondant à l'îlot nucléairea,2, 6. Ce rapprochement est soutenu par les deux États, qui associent les autorités de sûreté française et allemande dans une instance commune, la DFD (Deutsch-Französischer Direktionausschuss)2,7.
De 1989 à 1992, les programmes nucléaires franco-allemands ne sont pas unifiés : Framatome poursuit le programme REP2000, commandé par EDF en développant les réacteurs N4+ (successeurs des réacteurs du dernier palier N4), et Siemens-KWU le programme Planungsauftrag, commandé par les électriciens allemands en développant les réacteurs Konvoi B (successeurs des réacteurs Konvoi). En 1989, EDF, neuf producteurs d'électricité allemands et NPI amorcent un rapprochement des trois programmes (Produit Commun, REP2000 et Planungsauftrag), finalement concrétisé le par la naissance d'un projet unique : l'EPR, ou European Pressurized Water Reactor2.
Après la « déclaration commune » des autorités de sûreté française et allemande en 1993, puis d'un « avis favorable » sur les grands concepts de sûreté de l'EPR, EDF et les énergéticiens allemands commandent à NPI en 1995 des études de « Basic Design, » qui s'achèvent en après plus d'un million d'heures d'ingénierie. L’avant-projet détaillé est proposé en aux autorités de sûreté, ouvrant la voie aux études de réalisation plus détaillées2,3,7. Il n'est à ce stade pas décidé d'un lieu pour la construction d'un réacteur « tête de sérieb ».
Instabilités politiques et industrielles
La fin des années 1990 est marquée par un changement de majorité politique des deux pays, marquée par l'arrivée au pouvoir du premier gouvernement Jospin en et de la coalition SDP/Les Verts du gouvernement Schröder en Allemagne en . Le premier est très réticent au développement du nucléaire en France et le deuxième fermement opposé au nucléaire en Allemagne, opposition concrétisée par le vote de l'abandon du nucléaire civil allemand en 2001. Les études détaillées de réalisation ne sont pas entreprises et une nouvelle version du « Basic Design » est remise à l'ASN en 1999, l'autorité de sûreté Allemande s'étant retirée du projet7. La même année, EDF se voit refuser l'accord du Gouvernement pour construire un EPR en France.
L'absence de perspective de nouveau réacteur nucléaire en Allemagne entraîne un retrait progressif de Siemens dès 1999, qui fusionne ses activités nucléaires avec Framatome SA dans une nouvelle société, Framatome ANP (Advanced Nuclear Power), laquelle fusionne à son tour dans Areva avec la COGEMA, devenant Areva NP (Nuclear Power). En 2011, Siemens revend sa participation dans Areva NP à Areva pour 1,62 milliard €7,8. En 2015-2016, EDF rachète Areva NP, qui redevient Framatome.
En 2002, le changement de majorité politique français, plus favorable au nucléaire, et la sélection de l'EPR à l'appel d'offre de l'électricien finlandais TVO en 2003 permettent à EDF d'insister sur la nécessité de la construction d'un EPR « tête de série » en France. Le site de Flamanville est retenu en , le décret d’autorisation de construction signé en , et le premier béton coulé en 7.
Caractéristiques techniques
Puissance thermique | 4 500 MW |
Puissance électrique | 1 650 MW |
Rendement | 36 % |
Nombre de boucles primaires | 4 |
Nombre d'assemblages de combustible |
241 |
Taux de combustion (maximal d'un assemblage combustible) |
56 à 62 GWj/tmlic |
Durée de fonctionnement minimum à la conception |
60 ans |
L'EPR est un réacteur nucléaire à eau pressurisée (REP). Par rapport aux REP antérieurs construits en France, l'EPR est un projet plus complexe et plus puissant (1 650 MW contre 1 450 MW pour les réacteurs N4 et Konvoï). Il est présenté par Areva comme étant « évolutionnaire » et non « révolutionnaire11 », car il représente une optimisation des technologies des réacteurs de deuxième génération plutôt qu'une rupture technologique.
Sur le plan de la sûreté, ses objectifs sont de limiter les risques d'accidents et leurs conséquences (notamment de fusion du cœur du réacteur, qui contient l'uranium enrichi), de réduire les doses de radiations susceptibles d'affecter le personnel, et de diminuer les émissions radioactives dans le milieu environnant. Le niveau d'exposition du personnel aux radiations est réduit d'un facteur deux, et le niveau d'activité des rejets d'un facteur dix par rapport aux installations les plus récentes en service.
Sur le plan de la compétitivité, Areva NP met en avant l'accroissement de puissance, une meilleure disponibilité, un meilleur rendement thermique et une plus grande durée de fonctionnement par rapport aux réacteurs de génération II12.
Sur le plan technique, l’EPR se distingue notamment par son enceinte de confinement composée de deux parois en béton de 1,3 m d'épaisseur chacune, par quatre systèmes de refroidissement d'urgence indépendants, chacun capable de refroidir le réacteur après son arrêt, et par un nouveau dispositif, le récupérateur de corium, destiné à recueillir la partie du cœur fondu (corium) qui est susceptible de traverser la cuve13 (sans cela, le corium pourrait traverser le radier en béton, s'enfoncer dans la terre et contaminer l'environnement, dans le cas d'une fusion du cœur d'un réacteur nucléaire partielle ou totale).
Bâtiments de l'îlot nucléaire et de l'îlot conventionnel) d'un EPR (données Flamanville) : 400 000 m3 de béton, 50 000 t d’armatures (sept fois le poids de la tour Eiffel)14.
Pièces forgées
La chaîne de fabrication de cuves d'Areva NP ne permet pas de forger la totalité de la cuve d'un réacteur EPR (notamment la virole qui porte les tubulures). Le groupe a donc développé un partenariat avec l'entreprise japonaise Japan Steel Works (en) (JSW) (concurrent de Creusot Forge) qui garantit à Areva la fourniture de pièces forgées de grande taille15,16. JSW dispose, de fait, d'un quasi-monopole quant à la fabrication des grosses pièces forgées nécessaires à l'industrie nucléaire17.
Améliorations apportées par les réacteurs EPR …..
source : wikipedia