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L’Arménie dans l’œil du cyclone

Le 28 janvier l'Iran a subit plusieurs frappes de drones sur des objectifs militaires et para-militaires.
Le 29 janvier, ce fut au tour d'une colonne de véhicules porte-conteneur d'être détruite alors qu'ils transportaient des armes, des drones et des munitions. C'était cette fois en Syrie près de la frontière irakienne.
La nuit dernière, ce fut au tour d'une base militaire iranienne d'être attaquée en Syrie.
Les attaques sont quotidiennes et toujours à l'aide de drones. Les scénarios sont nombreux, les perspectives incertaines.

Une réponse militaire immédiate de l'Iran semble peu probable. Ce n'est pas la première fois qu'il est attaqué et jamais l'Iran n'a ouvertement répondu. Tout au plus il s'est contenté de menacer. Sans autres conséquences.
Cela ne signifie pas que l'Iran ne réagira jamais mais s'il fait le dos rond, c'est que ce n'est pas dans son intérêt de contre-attaquer.
L'Iran semble viser l'objectif d'obtenir l'arme nucléaire avant de pouvoir se montrer plus agressif ou tout au moins déterminé et menaçant. Et selon ses déclarations publiques, l'Iran serait très proche de parvenir à enrichir suffisement d'uranium en quantité nécessaire pour assembler une première bombe.

Cette volonté affichée de se doter de l'arme nucléaire est une ligne rouge pour Israël qui a répété à maintes reprises qu'il ne l'autoriserait jamais. Avec ou sans le soutien de puissances étrangères.
Ces attaques pourraient être analysées dans ce contexte:
– soit comme un ultime avertissement indiquant à l'Iran qu'Israel à les capacités de l'attaquer où et quand il le souhaite. Il se dit aussi que le dernier tremblement de terre qui a touché l'Iran, juste au moment des attaques du 28 janvier, pourrait être lié à la destruction d'un entrepôt souterrain de missiles balistiques.
– soit comme le début d'une campagne générale. Dans ce cas, nous pourrions assister à une opération visant à évaluer les défenses anti-aériennes et la capacité réelle des armes envisagées avant la grande offensive visant à détruire définitivement les capacités nucléaires de l'Iran, voire à provoquer un changement de régime avec le rêve d'un démantèlement du pays.

Attaquer l'Iran pose un grand danger d'escalade et de déflagration mondiale.

1) Israël ne peut pas vaincre l'Iran avec des attaques essentiellement aériennes.

2) Une telle stratégie amènerait forcément à un renforcement du pouvoir des mollahs. L'Iran n'est pas la Serbie de 1999 qu'on peut vaincre avec des missiles. 

3) L'Iran ne pourrait être vaincu qu'avec une attaque au sol en complément pour provoquer un changement de régime. L'ennemi d'Israël n'est pas la bombe nucléaire mais le régime qui la possède. Et on sait tous que ce qui ne tue pas rend fort. 

4) L'Azerbaïdjan est le seul pays qui aurait un intérêt direct à intervenir. D'où peut être le recrutement de généraux turcs dans le commandement central azeri. L'Iran n'est pas l'Arménie. 

5) Le Pakistan s'est toujours déclaré déterminé à soutenir l'Azerbaïdjan dans une possible guerre avec l'Iran. Quelle forme prendrait ce soutien ? Probablement similaire au soutien Biélorussie à la Russie (menace d'intervention) et soutien matériel.

Mais il ne faut pas se leurrer, si l'Azerbaïdjan attaque directement, ce sera avec la promesse de conquérir les régions azerie de l'Iran qu'il revendique. On se retrouve avec le même scénario russe en Ukraine avant de constater que la grande majorité des russophones d'Ukraine ne veulent pas de la Russie ! Cette guerre d'Iran est la guerre d'Israël contre l'Iran, exactement comme l'Ukraine est le terrain de jeu des États-Unis contre la Russie. Un enlisement à terme de l'Azerbaïdjan, voire une défaite pure et simple n'est pas à exclure.

Car dans un tel scénario, il serait absurde et ennemi que l'Arménie ne profite de l'occasion pour régler ses problèmes sécuritaires avec l'Azerbaïdjan.

Ce scénario pose un problème à l'Azerbaïdjan et donc à Israël, d'où la volonté peut-être de régler la menace arménienne (en ouvrant le couloir du Zanguezour) avant de s'attaquer directement à l'Iran.

Il y a aussi le facteur russe alors que la Russie est devenu le premier investisseur étranger en Iran devant la Chine. Si la Russie arrive à débloquer à son avantage le front ukrainien, une attaque contre l'Iran ou l'Arménie se fera plus pressante pour déstabiliser la Russie et pour priver l'Iran d'une assistance qui pourrait se révéler décisive.

Quoi qu'il en soit, la fin de la partie se jouera à Téhéran et ce sera à l'initiative d'Israël et des États-Unis. Tout dépend du délai estimé pour que l'Iran se dote de l'arme nucléaire.

Armen RAKEDJIAN