Les vrais chiffres des mauvaises choses
L’Institut national d’études démographiques (INED) apporte un éclairage sur l’impact réel de la Covid dans la hausse des décès en 2020 (en France du moins).
«L’objectif de cette étude n’était pas de minimiser la dangerosité du virus, ni de contester que 68.000 morts y sont liées, mais de montrer que la hausse du taux de mortalité [9,2 en 2019, contre 9,8 en 2020 selon l’Insee, ndlr] a d’autres causes explicatives.» explique le chercheur
S’appuyant sur les chiffres de Santé publique France et de l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), les scientifiques se penchent sur les morts imputées au Covid et comparent la mortalité totale de l’année 2020 à celle de 2019, avant l’apparition du virus sur le territoire.
Sur 654.000 décès en 2020, le décompte officiel dénombre 65.000 directement causés par le Covid-19 –68.000 avec les 5% non comptabilisés dans les Ehpad.
Ces chiffres estimeraient trop rapidement et trop largement pour quantifier réellement la surmortalité du Covid. Selon le chercheur au moins 13.000 d’entre eux seraient morts dans tous les cas du simple vieillissement de la population, qui s’amplifie chaque année avec la stagnation de l’espérance de vie. Autrement dit, ces 13.000 décès attribués au virus l’auraient été de vieillesse.
«Certaines causes de décès ont en effet reculé par rapport à 2019. D’abord, il n’y a pas eu d’épidémie de grippe très meurtrière . En 2018-2019, elle faisait, a contrario 12.000 morts. Il y a également eu moins de décès liés à des accidents comme ceux de la route», explique Gilles Pison.
Comme l’année 2019 a vu 599.000 décès (soit 55.000 de moins qu’en 2020), l’excédent ne serait donc que de 42.000 morts en un an. Et si le nombre de morts liées au Covid-19 est supérieur à cet excédent annuel, c’est sans doute parce que les mesures sanitaires ont permis de réduire la mortalité liée à d’autres facteurs. Sans celles-ci, le nombre de morts en 2020 aurait été plus élevé encore.
Si pour la France c’est la plus meurtrière de son histoire récente, «une partie de ces décès supplémentaires s’explique par des évolutions structurelles», rappelait déjà Le Monde en janvier 2021.
Le chercheur de l’INED avance une troisième cause à la baisse des morts hors Covid: la fameuse comorbidité, à savoir la ou les pathologies s’ajoutant à la maladie initiale, qui compte parmi les facteurs aggravant le coronavirus.
«Certaines personnes seraient mortes dans les mois à venir du fait de leurs pathologies. Or ces cas-là sont très difficiles à quantifier, c’est le travail de l’Inserm [Institut national de la santé et de la recherche médicale, ndlr] de réceptionner les certificats médicaux et de confirmer ou infirmer que la cause est bien le Covid-19. ».
La mortalité réellement causée par le virus pourrait être amenée à évoluer et semble aujourd’hui imprécise.
sources : INED /Gilles Pison, France Maslé du Muséum national d’histoire naturelle , INSEE, INSERM, Le Monde