Feed Back #2 et Ambiente de Stéphanie Aubin. Un diptyque de danse plastique envoûtant
Pour le festival Temps d’images, le 104 accueillait ce samedi 28 septembre Stéphanie Aubin, directrice du Manège de Reims : dans l’esprit innovant qui est celui du lieu, la chorégraphe a présenté deux pièces étonnantes d’une rare beauté plastique.
Au fond de la scène, apparaît dans un noir complet une tache de lumière blanche : une forme qui se déplace de façon organique dans la peine-ombre, prend différentes apparences. Puis la lumière monte et on reconnaît un corps, deux corps, qui évoluent, prenant appui l’un sur l’autre, dans un perpétuel mouvement composé de quatre tableaux. Ce premier duo, Feed Back #2, est d’une grande simplicité. Rien n’est caché. On perçoit les impulsions, les points d’appui et d’équilibre. Et pourtant, grâce à la fluidité des mouvements portés par une solide interprétation et au rythme linéaire, il se dégage une sensation d’apesanteur, de suspension permanente. Le spectateur contemple un univers familièrement étrange, que l’admirable bande son composée des souffles, des contacts et des appuis des danseurs amplifiés, contribue à créer.
Ambiente est un solo. Ou plutôt un duo entre l’homme et la lumière. Le corps de l’interprète, placé devant un projecteur orienté face au public, en fond de scène, ne se discerne d’abord que par les interstices dans lesquels s’engouffrent les rayons lumineux. C’est la lumière qui danse, dans l’espace laissé entre une côte et une cuisse, entre deux mains et un genou en appui sur le sol, le temps d’une suspension ou d’un pas. Puis cette lumière malléable, partenaire docile du danseur, se transforme en murailles vaporeuses qui traversent la scène, dans lesquelles le corps de l’homme plonge, s’engloutit, s’efface.
Etonnantes mais sobres, les chorégraphies de Stéphanie Aubin modifient notre perception du mouvement et de l’espace scénique, sans jamais se complaire dans l’illusionnisme. Chaque effet, parfait, se donne pour ce qu’il est : une suspension, une projection d’image sur un vêtement blanc, une accélération, un projecteur partiellement caché. Au détour d’un saut arrêté dans les airs, de la disparition partielle d’un corps dans une mer de lumière, de la répétition infinie d’un mouvement qui s’accélère, l’expérience sensorielle de cette danse plastique revêt une envoûtante force poétique.
Mélanie Mesager
(Photographies: Alain Julien et Laurent Philippe)