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Les services secrets britanniques derrière la deuxième guerre du Haut-Karabakh ?

Un soldat russe au monastère de Dadivank, dans le Haut-Karabakh, le 16 novembre 2020. Andrey BORODULIN / AFP
Un soldat russe au monastère de Dadivank, dans le Haut-Karabakh, le 16 novembre 2020. Andrey BORODULIN / AFP
Selon la presse russe et arménienne, le Royaume-Uni serait en train de reprendre le Grand Jeu – cette rivalité coloniale avec la Russie en Eurasie qui a marqué le XIXe siècle.
Et il pourrait bien être le véritable artisan et le principal bénéficiaire potentiel de l’élan expansionniste turc, à en croire les analyses.
 
“Des signes sinistres de panturquisme renaissent dans la politique de la ‘nouvelle’ Turquie d’Erdogan, dont les ambitions géopolitiques semblent soutenues par les adeptes et les héritiers du colonialisme britannique”, confirme le journal arménien Noev Kovcheg. Et de rappeler que, dès la nomination de Moore à la tête de MI6, de nombreux experts russes “auguraient une déstabilisation sur le pourtour des frontières” de la Russie.

Londres a voté contre la résolution sur le cessez-le-feu à l’ONU

Le journal arménien Zham insiste sur la nécessité de révéler au grand jour “le sens réel de l’activité de toutes ces organisations financées par Londres en Arménie”. Le titre rappelle que le Royaume-Uni a été le seul pays du Conseil de sécurité des Nations unies à bloquer, le 5 novembre, une résolution sur le cessez-le-feu dans le Haut-Karabakh.
Le Royaume-Uni est “parmi les instigateurs de la deuxième guerre dans le Karabakh”,estime, quant à elle, l’orientaliste russe Karina Guévorguian dans les pages du journal arménien Novostink. D’ailleurs, alors que les hostilités entre l’Azerbaïdjan et le Haut-Karabakh ont été déclenchées le 27 septembre par Bakou, le Parlement britannique adoptait en octobre une résolution condamnant “l’acte d’agression de l’Arménie”, se réjouissait alors le site azerbaïdjanais Media.
 
Le Karabakh, prorusse depuis deux siècles, brouille depuis lors les cartes des Britanniques : c’est à partir de la libération du Karabakh du joug perse (la région était alors un khanat perse, royaume dirigé par un khan) et sa prise dans le giron impérial russe en 1805 que “la Russie a pu étendre son pouvoir sur tout le Caucase, puis sur le Turkestan [ancien nom de l’Asie centrale actuelle]”, entravant ainsi l’expansion coloniale britannique en Asie, rappelle l’experte. “La Turquie néo-osmanienne et néopanturquiste pourrait bien être considérée par Londres comme une plateforme pour déstabiliser le Caucase du Sud et évincer la Russie”,renchérit l’analyste.

La Turquie, un “bélier” de Londres pour avancer ses pions

“Il paraîtrait que Londres a fait de la Turquie un ‘bélier’ pour avancer ses pions, et Erdogan est tout à fait satisfait que la Grande-Bretagne soutienne son projet”,explique FSK.
L’ancien Premier ministre arménien Grant Bagratian, interrogé par FSK, ne mâche pas ses mots :
Ce qui se passe autour du Haut-Karabakh est une opération des services spéciaux britanniques et de Richard Moore, ami personnel du prince Charles.”
Mais le prince Charles a un autre bon ami : le président de l’Arménie, Armen Sarkissian, citoyen britannique. Bien que son rôle soit honorifique (l’Arménie est une république parlementaire depuis 2018), Sarkissian, investi en avril 2018, “a été le premier signe annonciateur de la révolution [‘de couleur’, financée par les structures du milliardaire américain George Soros]”. La rue a propulsé Nikol Pachinian, antirusse, à la tête de l’État arménien.
Cependant, Pachinian a signé l’accord tripartite de cessez-le-feu sous l’égide de Moscou, le 10 novembre. Il n’était donc pas “totalement contrôlé par l’Occident” et, au dernier moment, “il a pris une décision inattendue pour Moore et Erdogan”. Pas étonnant que deux jours après la signature de l’accord tripartite Moore se soit rendu à Ankara. Officiellement, pour rencontrer le porte-parole d’Erdogan, Ibrahim Kalyn, ce qui serait une “désinformation de la propagande turque pour mieux cacher le fait que Moore était venu voir Erdogan en personne”, croit comprendre le site d’information russe Regnum.

Et les soldats russes sont entrés dans le Karabakh…

Dans le Karabakh, l’objectif de “l’alliance turco-britannique” était de “régler une fois pour toutes la ‘question du Karabakh’, et de stationner à la frontière de l’Arménie pour approcher au maximum de la zone d’influence russe dans le Caucase”, poursuit FSK.
Mais au dernier moment, “quelque chose s’est enrayé, et c’est le soldat russe qui est entré dans le Haut-Karabakh”. Résultat, selon FSK : “Le succès de la stratégie britannique est limité : les troupes russes stationnent dans le Haut-Karabakh, et ce, sans le moindre [observateur ou Casque bleu] turc à l’horizon.” L’efficacité du “bélier turc” “devient ainsi sujette à caution”.
“Erdogan ne reconnaît qu’un seul droit, celui de la force, et il est fort du soutien discret mais efficace de la Grande-Bretagne”, croit savoir Novostink. Efficace, vraiment ? Le turcologue russe Stanislav Tarassov, interrogé par le journal en ligne russe Pravda, estime que le tandem Royaume-Uni – Turquie a perdu la partie :“Leur implantation dans le Caucase du Sud a échoué.”
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 2. Marianne
 
17 novembre 2020
 
https://www.marianne.net/monde/de-cendres-et-de-ruines-les-adieux-au-haut-karabakh
 
De cendres et de ruines : les adieux au Haut-Karabakh

 

 

 

 

 

De cendres et de ruines : les adieux au Haut-Karabakh

Reportage

 

Par Morgane Bona

 

 

Conformément à l’accord de cessez-le-feu, plusieurs territoires du Haut-Karabakh passeront d’ici le 1er décembre sous contrôle azerbaïdjanais. Entre pillages, terre-brûlée et acte de résistance désespéré, la région de Kelbajar connaît aujourd’hui un exode massif de sa population arménienne.

Des étincelles s’élèvent dans la pénombre. L’incendie gronde, des villageoises assistent impuissantes au triste spectacle. Leurs lamentations sont à peine audibles. Le feu lèche les murs jusqu’au toit de cette bâtisse du village de Dadivank situé dans la province de Kelbajar au nord-ouest du Haut Karabakh. Conformément à l'accord de cessez-le-feu total signé la semaine passée par le premier ministre de l’Arménie, la région devait tomber dans l’escarcelle de Bakou le 15 novembre. Finalement, en accord avec l’Azerbaïdjan, Erevan a annoncé le jour J que les Arméniens ont dix jours supplémentaires pour quitter les lieux.
À la hâte, Harutyun Mnaskanyan, rentré la veille de sa base militaire, a incendié sa maison. Sa famille n’a pas les moyens d’emporter ses biens en Arménie. Autour du brasier, sont dispersées les têtes et entrailles des chevaux et des ânes du soldat. Les habitants de Dadivank ont abattu 15 de leurs bêtes. « Je ne suis pas heureux de faire ça. Mais je ne peux pas laisser tout ce que je possède aux Azéris. Ma maison, c’est mon œuvre. Je dois la brûler avant de partir » explique ce père de famille, avant d’ajouter, désespéré : « Je vais rejoindre ma femme à Erevan, embrasser mes cinq enfants puis je repartirai à mon poste militaire. Je veux me battre et mourir là-bas ».
 
Il finit par incendier les ruches de son jardin sous les yeux de sa voisine, Alvard Ohanyan. La quarantenaire au gilet imprimé léopard, éclate en sanglots. Sa demeure de 200 mètres carrés est vide. Il n’y a plus de porte, plus de plinthes, ni d’électricité. Son époux, Hayk, a tout enlevé, jusqu’aux câbles électriques dans les murs. Seuls un lit et les fenêtres sont encore en place pour les deux nuits qui leur restent à passer avant de partir. Hayk Ohanyan précise : « Ce sont les fenêtres le plus chères du marché, bien entendu, on va les prendre avec nous. J’ai construit cette maison de mes propres mains, je n’ai pas le cœur d’y mettre le feu. Mon gouvernement m’a trahi, il m’a poignardé dans le dos, mais qu’est-ce que j’y peux ? » 
 

ADIEUX AU MONASTÈRE

Les Ohanyan vivent au pied du monastère de Dadivank depuis 21 ans :« Je me suis promis qu’après mon mariage, je m’installerai près d’une église » confie Alvard. Cette native de la région de Martakert (Haut-Karabakh) frontalière de celle de Kelbajar, s’apprête à vivre son second exil : « J’avais 19 ans quand on a dû se réfugier en Arménie à cause de la guerre. C’était en 1992, nous avions une très grande maison à l’époque. Les Turcs l’ont brûlée. J’avais dit à ma mère de ne pas pleurer, que l’on en reconstruirait une ». 
Sur les hauteurs, au monastère de Dadivank, c’est l’effervescence. Des centaines de personnes se pressent entre les églises et chapelles construites entre le IX et le XII siècle, à flanc de montagne. Des pèlerins ramassent la terre et les pierres de ce lieu primordial pour l’Eglise apostolique arménienne. Sur le parvis, portable en main, les séances photos s'enchaînent.
Ani Geghamyan, 26 ans, est venue spécialement d’Erevan avec un groupe de 20 personnes pour faire ses adieux au monastère : « J’étais déjà venue, une fois, avec ma famille. On avait participé à un baptême, cela m’avait impressionnée. J’espère que nous pourrons revenir un jour ». Son amie lui coupe la parole : « Bien sûr que nous reviendrons ! Nous nous marierons et nous nous ferons baptiser ici. Et, nos enfants viendront visiter Dadivank. Nous avons foi en la puissance divine, notre mère patrie ne peut pas profiter à l’ennemi ». Cependant la jeune femme est inquiète : « Nous le retrouverons sûrement pas dans le même état où nous l’avons laissé. C’est pour ça que nous prenons des photos de chaque croix, chaque pierre pour être en mesure de nous rappeler comment c’était ». Pour le maître des lieux, le prêtre Hovhannes, pas question de quitter l’office qu’il occupe depuis 2015. « Quand je ne suis pas là, même si cela ne dure qu’un jour, j’ai l’impression d’avoir perdu une partie de moi ». En 1993, l’ecclésiastique avait même participé à la « libération de Dadivank » avec les troupes arméniennes.
À l’époque, la région de Kelbajar, où se trouve le complexe religieux, était azerbaïdjanaise. L’édifice, en ruine, ne fut rouvert que l’année suivante et restauré à partir de 2004. « Pierre après pierre, on a rénové ce monastère pour qu’il retrouve sa superbe » se souvient le père Hovhannes. « Je crains que le monastère tombe entre les mains des Azéris car je sais qu’ils vont détruire le patrimoine chrétien. Ils l’ont déjà fait il y a 70 ans. Et la nouvelle génération est bien pire que les précédentes car, on lui enseigne dès le plus jeune âge que les Arméniens sont des assassins. J’attends un miracle, qu’une bonne nouvelle soit annoncée ». Les prières du prêtre natif du Haut-Karabakh ont finalement été entendues : vendredi 13 novembre, des troupes russes ont pris position pour protéger le monastère de Dadivank.

DES ARMÉNIENS VIENNENT PILLER CE QUI RESTE DE LEURS COUSINS DU HAUT KARABAKH

Partout dans la région, les mêmes scènes de désolation se répètent. Les brasiers succèdent aux destructions. Après trois jours de préparation, Lilith et Vrech Fahradyan ont pu caser leurs derniers sacs dans les véhicules des proches venus les aider à déménager. Dans l’atmosphère glaciale du crépuscule, le couple contemple l’incendie. Leurs rétines humides sont hypnotisées par les flammes qui s’échappent des fenêtres de leur foyer. Une nuée de journalistes capture le désastre.
Pour cette mère de trois enfants, rester à Kelbajar était impensable : « Ils ont tué mon frère, mon oncle, mon père. Comment je pourrais coexister avec des gens comme ça ». De peur que le cimetière soit saccagé par les Azerbaïdjanais, la famille a même exhumé le corps du grand-père pour l’enterrer en Arménie.
Mais, pour l’heure, ce ne sont pas les Azerbaïdjanais qui pillent le Kelbajar. Lidia et son mari Gulvern, derniers habitants de leur village, surveillent les allées et venues dans leur bourg. Fusil en main, le vieil homme interpelle des intrus garés devant chez ses voisins. Il les invective, les menace puis tire deux fois dans leur direction. Les pillards déguerpissent à bord de leur van métallisé.
De sa voix brisée, Lidia dénonce : « Des gens ont volé le domicile d’un soldat. Ils en ont pris les câbles et les lampes. Ils ont complètement désossé la maison, pris le toit puis, ils l’ont incendiée. Ce ne sont pas les Turcs (dénomination péjorative des Azerbaïdjanais) qui font ça. Ce sont des gens venus d’Arménie ». Amère, la villageoise questionne :« Comment des Arméniens peuvent voler les leurs ? Finalement, peut-être que les turcs sont mieux ». Pourtant, Lidia s’apprête, elle aussi, à fuir en Arménie, sans réellement savoir où elle pourra s’installer. Une chose est sûre, elle ne reviendra pas au Haut-Karabakh : « Trois fois, j’ai construit une maison et, trois fois, j'ai dû partir. Une fois en 1991, une fois en 2016 et cette fois. Peu importe où j’habiterai, tant que ce n’est pas ici ». Son époux, lui, reste au village : « Pourquoi je devrais partir ? Je ne vois pas de qui je devrais avoir peur. De toute façon, les Azéris ne viendront pas jusqu’ici ».

"QUELQUES JOURS POUR COUPER LE MAXIMUM DE BOIS"

Des centaines d’hommes chargent d’imposants véhicules de bois coupé sur les bas-côtés de la route. La pratique est pourtant illégale depuis les années 90 pour préserver l’environnement. Hovik qui vient de Vardenis en Arménie avoue : « on a quelques jours pour couper le maximum de bois avant que ça devienne azéri. Puis on va le revendre en Arménie ».Pour le fermier c’est une manne financière non négligeable car, dans le pays le combustible se vend à prix d’or à la saison froide. Les camions bennes gavés de bois ralentissent le trafic des milliers de voitures qui s’empressent de quitter la région. En sens inverse, des dizaines de bus ramènent des femmes et des enfants vers Stepanakert et ses environs, qui avaient été évacués le 7 novembre.
Plus de 700 personnes sont ainsi retournées dans ce qui reste du Haut-Karabakh arménien, amputé de Chouchi et de plusieurs régions telles que Hadrout au sud, de Latchine à l’ouest et de la ville fantôme d'Aghdam à l’est. Cerné par les troupes azerbaïdjanaises, le village de Khachmach attend encore le retour de 200 de ses habitants, principalement des femmes et des enfants. La route pour accéder à cette bourgade au sud-est de Chouchi est désormais une ligne de démarcation entre Azerbaïdjanais et Arméniens. Cette voie est trop dangereuse et les habitants doivent emprunter un chemin boueux à travers les bois et les champs pour rejoindre Khachmach. Dans cette commune, il n’y a plus courant. Pour sa consommation électrique, le village dépend d’une localité voisine, désormais sous contrôle azerbaïdjanais.
Le maire Khachmach, Rafik Grigoryan, espère un retour rapide à la normale mais il reconnaît qu’« être entouré par les Azéris va affecter notre vie quotidienne, car, notre ennemi est en face de nous, à deux kilomètres. Peut-être que ça se passera bien. Le temps nous le dira. Si c’est nécessaire, nous nous organiserons pour sécuriser le village ». Un de ses administrés ajoute : « Il faut que la jeune génération revienne vivre ici et prospère pour faire peur aux Turcs ».
Mais les aspirations des jeunes sont moins affirmées. Akadim Ghazariayan, 20 ans, qui est resté au village durant toute la guerre, n’a aujourd’hui qu’un désir : « j’aimerais partir car ça ne sera plus jamais comme avant. Ce village va garder la frontière de l’Artsakh (dénomination arménienne du Haut-Karabakh), un peu comme le mur dans Game of Thrones. Je pensais déjà à partir, mais cette fois c’est décidé. Je vais rejoindre mon frère à Erevan ».

 

 

 

 
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3. Nouvelles d'Arménie
 
17 novembre 2020
 

Revue de la presse arménienne du 14 au 16 novembre 2020

 

 

Situation au Karabakh/ L’Azerbaïdjan a prolongé la date de retrait des troupes arméniennes de Karvatchar jusqu’au 25 novembre. 475 personnes déplacées sont retournées à Stepanakert depuis l’Arménie, accompagnées par des soldats de la paix russes. Auparavant, un groupe de 250 personnes évacuées était retourné à Stepanakert. Le processus d’échange des corps des victimes de la guerre du Haut-Karabakh a débuté sous la coordination de la mission russe de maintien de la paix et la participation du CICR et du Service d’État des situations d’urgence du Karabakh. Selon le Président de facto du Karabakh, les corps d’environ 150 soldats arméniens ont été récupérés dans la périphérie de Sushi et des centaines de corps sont toujours sur les champs de bataille. Selon les autorités, le nombre total de militaires arméniens tués dans la guerre a atteint 1434. Le gendre de l’ancien Président Serge Sarkissian, Mikayel Minasyan, a accusé Pachinian de cacher le nombre exact de victimes militaires arméniennes, déclarant que 4750 soldats étaient en réalité morts dans les combats avec l’Azerbaïdjan. Des photos circulent sur les réseaux sociaux, montrant comment les habitants du Karabakh démolissent, détruisent, brûlent leurs propres maisons et transfèrent les restes de leurs proches décédés des territoires qui seront prochainement transférés à l’Azerbaïdjan. Le Ministère russe des situations d’urgence a envoyé 30 spécialistes et un hôpital mobile pour effectuer une mission humanitaire au Karabakh.
Le SSN dit avoir empêché le meurtre de Pachinian et l’usurpation du pouvoir/ Le Service de sécurité nationale (SSN) a déclaré avoir empêché le meurtre de Pachinian et l’usurpation du pouvoir. Le SSN a révélé des cas d’acquisition et de possession illégale d’armes, de munitions et d’explosifs par un groupe d’individus à cette fin. Selon le SSN, « sur la base de soupçons directs », un certain nombre de personnes ont été arrêtées, dont le chef du parti « Patrie », Artur Vanetsyan, l’ancien député républicain, Vahram Baghdasaryan, un membre des Dachnak et le commandant du détachement de l’armée de Sisian, vétéran de la première guerre du Karabakh, le colonel Ashot Minasyan. La cour a libéré Vanetsyan et Baghdasaryan, mais a maintenu la détention de Minasyan.
Le MDD nie les informations sur la vente des armes aux groupes terroristes pro-Turcs en Syrie/ Le porte-parole du ministère arménien de la défense, Shushan Stepanyan a rejeté les informations diffusées sur Internet selon lesquelles le ministre Davit Tonoyan aurait été impliqué dans des ventes d’armes aux groupes terroristes pro-Turcs en Syrie. Selon elle, il s’agit de mensonge éhonté et d’une manipulation visant à discréditer le ministère. D’après elle, les documents en circulation sur lesquels se fonde cette thèse sont pour la plupart des faux.
Réunion du Président russe sur le Karabakh/ La presse rend compte de la réunion du Président russe sur le Karabakh. D’après les informations russes, le nombre de victimes du conflit du Karabakh, y compris les civils, a dépassé 4 000 et plus de 8 000 personnes ont été blessées. Un décret a été signé sur la création d’un centre humanitaire qui s’occupera du retour des réfugiés, de la reconstruction des infrastructures et favorisera la coopération entre Erevan et Bakou. Le service russe des frontières a placé cinq postes supplémentaires sur la fournière arménienne, dont deux à la frontière avec l’Iran. La Russie négocie avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan pour lancer les travaux des organisations humanitaires internationales au Karabakh. Moscou a informé les États-Unis et la France des accords sur le Karabakh. Poutine a déclaré espérer que le mot « conflit » ne sera pas utilisé pour décrire la situation au Haut-Karabakh.
L’Arménie appelle l’Azerbaïdjan à respecter ses obligations au titre de la convention internationale/ Dans une lettre datée du 11 novembre, la République d’Arménie s’est adressée à la République d’Azerbaïdjan en faisant remarquer que les actions et les politiques adoptées au cours des dernières décennies sont en violation flagrante de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de 1965. L’Arménie a appelé d’urgence l’Azerbaïdjan à cesser ses pratiques discriminatoires et autres violations continues à l’égard de l’Arménie et des Arméniens de souche. Elle a exhorté l’Azerbaïdjan à respecter ses obligations au titre de la Convention et a invité ce dernier à traiter ses violations de la Convention et leurs conséquences par le biais de négociations. « Si le gouvernement de l’Azerbaïdjan rejette l’invitation de l’Arménie ou ne répond pas à celle-ci dans le délai fixé, l’Arménie se réserve le droit de chercher à régler ce différend juridique conformément à la procédure établie dans la Convention ».
Poutine a souligné l’importance de l’entretien des monuments chrétiens au Karabakh/ Le Président russe a eu des conversations téléphoniques avec les dirigeants arménien et azerbaïdjanais. Parlant au Président azerbaïdjanais, Poutine a attiré son attention sur le fait que des églises et des monastères chrétiens étaient situés dans les zones qui sont rendues à l’Azerbaïdjan conformément à la déclaration tripartite. À cet égard, il a souligné l’importance d’assurer la préservation et la vie religieuse normale de ces sanctuaires. « Le président de l’Azerbaïdjan a fait preuve de compréhension à cet égard et a déclaré que la partie azerbaïdjanaise agirait conformément à ce principe ». Le chef du service de presse du Saint-Siège d’Etchmiadzine a déclaré que le monastère de Dadivank était déjà sous la protection des soldats de la paix russes et n’était pas en danger. Plus tôt, le Saint-Siège d’Etchmiadzine a publié une déclaration condamnant fermement le vandalisme récent par les Azerbaïdjanais de la cathédrale du Saint-Sauveur de Ghazanchetsots, dans la ville de Shushi. Il a appelé la communauté internationale et les organisations interreligieuses et interconfessionnelles à s’exprimer à ce sujet et à prendre les mesures appropriées pour mettre fin à ces actes barbares des autorités azerbaïdjanaises dans le Karabakh contre les monuments religieux et culturels et les manifestations d’humeur anti-arménienne. Le Conseil œcuménique des Églises a publié une déclaration à ce sujet et a demandé à l’UNESCO de protéger les sanctuaires du Karabakh. Le ministère arménien de l’éducation, de la science, de la culture et des sports s’était également adressé aux organisations internationales compétents pour prévenir immédiatement le vandalisme culturel. Le Ministère arménien des Affaires étrangères a également condamné l’acte de vandalisme de l’église Ghazanchetsots à Shushi.
Publication Facebook controversée de Pachinian ; démissions à la suite de cette publication/ Dans la nuit du 15 au 16 novembre, le Premier ministre a fait la publication Facebook suivante : « J’ai regardé des dizaines de vidéos de soldats du front aujourd’hui. Je suis étonné par la perspicacité des garçons. Les gars, vous avez raison. Je vous attends à Erevan. Pour enfin résoudre les problèmes de ceux qui pleurent sous les murs. Je suis fier de vous ». Cette publication a été largement perçue comme un appel à une guerre civile et a fait objet d’une ferme condamnation de l’Ombudsman arménien. Selon l’Ombudsman, ce post est particulièrement condamnable dans le contexte des vidéos publiées ces derniers jours avec la participation de personnes armées en uniforme militaire, contenant de la haine, des appels à la violence et des menaces de mort. « Il est évident que les soldats du front sont armés, et cette publication présuppose la mise en œuvre de ces appels et menaces, de la vengeance » a déclaré l’Ombudsman. A la suite de cette publication, la députée du parti au pouvoir Taguhi Tovmasyan a déclaré quitter le groupe parlementaire, deux autres députées progouvernementales, Lusine Badalyan et Gayane Abrahamyan, ont déclaré qu’elles renonceraient à leur mandat. En outre, Serge Sisserian, chef du cabinet du vice- Premier ministre Avinian, a également démissionné à la suite de cette publication. Irina Ghaplanyan, la vice-ministre de l’environnement a annoncé sur Facebook qu’elle avait présenté sa démission. Une chaine Telegram a entretemps déclaré que Pachinian mobilisait des gangs armés « Gardiens de la révolution » qui menaçaient ses opposants. Selon l’Ombudsman, un des députés du parti au pouvoir a reçu des menaces après avoir critiqué la publication de Pachinian.
Réactions internationales/ Le vice-ministre des Affaires étrangères d’Iran, Abbas Araghchi, a rejeté vendredi les rumeurs concernant la modification des routes de transit de l’Iran vers l’Arménie et l’Azerbaïdjan. En outre, le 14 novembre, le Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) a pris pour cible les positions des groupes terroristes contre-révolutionnaires « de l’autre côté des frontières nord-ouest de notre pays », leur infligeant de lourdes pertes et des blessés. La représentante officielle du ministère russe des affaires étrangères, Maria Zakharova, a déclaré que malheureusement, les militants qui avaient été transférés au Karabakh n’ont pas disparu. « Nous supposons que cette question sera résolue, et toutes les parties intéressées par la paix dans cette région doivent faire des efforts pour la résoudre » a déclaré Zakharova. Elle a également réitéré qu’il n’y aurait pas d’unités de maintien de la paix turques dans le Haut-Karabakh. D’après elle, le centre russo-turc pour le contrôle du cessez-le-feu dans le Haut-Karabakh (cf. revue du 12 novembre 2020) fonctionnera exclusivement à distance, en utilisant des moyens techniques de surveillance objective, y compris des drones et d’autres technologies, qui permettent de déterminer la situation sur la ligne de contact et de déterminer quel camp respecte ou viole toutes les conditions de combat et de cessez-le-feu. Le Royaume-Uni a salué le fait que les dirigeants de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan ont convenu de mettre fin aux combats et a appelé toutes les parties à agir de manière responsable et de bonne foi pour permettre l’acheminement urgent de l’aide humanitaire. Le Royaume-Uni a réitéré son soutien au Groupe de Minsk de l’OSCE : « ses principes de Madrid constituent une base solide pour une résolution durable du conflit, et ses structures fournissent le cadre pour leur mise en œuvre ».
Interview de Pachinian/ Dans une interview à la télévision publique, Nikol Pachinian a souligné que la déclaration sur la fin de la guerre n’était pas un document politique de règlement du conflit et que les discussions diplomatiques devaient encore commencer. En ce qui concerne la déclaration de l’opposition selon laquelle il est encore temps d’annuler la déclaration, Pachinian a déclaré que son annulation signifierait mettre en danger 30 000 soldats arméniens. A la question de savoir pourquoi la question n’a pas été discutée au Parlement et avec l’opposition, Pachinian a déclaré qu’il était dans la logique de la gestion opérationnelle des opérations militaires. Quant aux accusations selon lesquelles les autorités n’avaient pas réussi à organiser correctement les activités pendant la guerre, Pachinian a déclaré qu’il y a de nombreux problèmes d’organisation pendant toutes les guerres. « Pendant cette guerre-là, il y a eu d’autres lacunes en termes d’organisation, notamment dans le cadre de la mobilisation ». A la question de savoir pourquoi la séance du Parlement n’a pas eu lieu alors que les forces de l’opposition voulaient la convoquer et discuter de la situation, Pachinian a déclaré qu’il ne pensait pas que cette question devrait être discutée dans un contexte émotionnel. Pachinian a évoqué les discussions selon lesquelles la Russie aurait fourni une meilleure assistance à la partie arménienne pendant la guerre, s’il y avait eu un autre gouvernement en Arménie, étant donné que les dirigeants actuels n’ont pas été en mesure d’assurer de bonnes relations avec la Russie. Selon lui, il ne s’agit pas des relations entre les autorités d’Arménie et de Russie, mais de la position de la Russie sur la question du Haut-Karabakh qui n’a aucunement changé au cours des 4,5 dernières années. À la question portant sur ses relations avec le Président russe, Pachinian a répondu que c’était de « très bonnes » relations de travail. Pachinian déclare qu’il existait des conceptualisations sur les questions qui seront discutées lors des négociations qui suivront la déclaration de fin de guerre. « Nous voulons, par exemple, que le chemin de fer Arménie-Iran passe par le Nakhitchevan. Nous parlons du déblocage des communications de transport » a déclaré Pachinian.
Proposition de déclarer le 22 novembre journée de commémoration/ Le Président, Armen Sarkissian, et le Catholicos, Karékine II, ont lancé un appel pour déclarer dimanche prochain, le 22 novembre, une journée de commémoration de tous les héros tombés pour la défense de la patrie et organiser un service commémoratif dans toutes les églises arméniennes du monde. Entretemps, des milliers de citoyens ont participé samedi à la cérémonie d’allumage des bougies en mémoire des soldats tombés. La cérémonie avait été organisée par les forces d’opposition.
117886 cas confirmés de coronavirus/ Au moment de la rédaction de cette revue, les autorités ont confirmé 117886 cas de coronavirus dans le pays dont 75865 ont été guéris et 1788 patients sont décédés.
Rédaction : Lena Gyulkhasyan
Ambassade de France

 

 

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4. Nouvelles d'Arménie
 
17 novembre 2020
 

Les forces spéciales turques d’élite « Komando » ont fui Martuni le dernier jour de la guerre

 

 

 

 

 

 

 

Le projet @wargonzo a obtenu des photos prises par les soldats de l’Armée de Défense d’Artsakh sur le front Martuni. C’est dans cette direction que les forces armées azerbaïdjanaises ont commencé à battre en retraite, transférant toutes leurs forces à l’assaut de Chouchi.
Naturellement, l’armée azerbaïdjanaise a reculé avec des pertes. Ainsi, un couteau de combat numéroté a été retrouvé sur l’un des officiers tués – à partir d’un lot de couteaux émis sur commande spéciale pour une unité d’élite de « rangers » turcs. Cette découverte indique indirectement que parmi ceux qui se retiraient près de Martuni, il y avait également des combattants des forces spéciales Komando envoyés par Ankara en Artsakh.
Dans ce contexte, le projet soumis par Erdogan au parlement sur l’introduction des troupes turques en Azerbaïdjan ne ressemble à rien de plus qu’une farce. Depuis que l’armée turque a initialement pris une part active au conflit.

 

 

 
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 5. Nouvelles d'Arménie
 
16 novembre 2020
 

http://www.armenews.com/spip.php?page=article&id_article=72083

Les Loups gris sévissent en Allemagne contre les Arméniens

 

 

 

 

 

 

 

Après la France, les Loups gris ultra nationalistes turcs d’Allemagne distribuent ce texte -en turc- dans les boites aux lettres des Arméniens.
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« Les loups gris vous traquent !!! Aux enfants répugnants de l’Arménie ; nous vous trouverons tous et vos enfants avant d’être enterrés se planteront devant vos tombes. Nous sommes à côté de nos frères d’Azerbaïdjan en nous permettrons pas aux chiens infidèles d’Arménie de vivre en paix en Allemagne. Nous vous connaissons et nous savons où sont vos enfants jour et nuit. Les loups gris vous traquent !!! ».

 

 

 
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 6. Nouvelles d'Arménie
 
16 novembre 2020
 

Les Forces armées russes fournissent une assistance à la population locale dans le rétablissement d’une vie normale

 

 

 

 

 

 

 

Dans le cadre de l’exécution des tâches de maintien de la paix au Haut-Karabakh, des unités du contingent russe de maintien de la paix, en coopération avec l’administration locale, aident la population à retrouver une vie normale et paisible.
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Les militaires de la paix russes effectuent des opérations de reconnaissance technique, de déminage des routes et du matériel, d’enlèvement du matériel brûlé des routes publiques.
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À Stepanakert, l’organisation de la circulation routière, de l’approvisionnement en électricité et en eau des objets sociaux des infrastructures civiles et des bâtiments résidentiels a été rétablie.

 

 

 
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 7. Nouvelles d'Arménie
 
17 novembre 2020
 

Les soldats de la paix russes se penchent sur la question des visites des pèlerins au monastère de Dadivank

 

 

 

 

 

 

 

Les soldats de la paix russes travaillent sur la question de la garantie de visites des pèlerins au monastère de Dadivank dans le Haut-Karabakh, a déclaré le porte-parole du ministère russe de la Défense, le général de division Igor Konashenkov, rapporte l’agence de presse RIA Novosti .
Il a noté qu’à la demande des résidents locaux, l’armée russe a installé un poste d’observation près du monastère.
« Le commandement du contingent de maintien de la paix a organisé une interaction avec les administrations locales pour résoudre les problèmes des communautés de confessions religieuses », a ajouté Igor Konashenkov.
Dadivank est un monastère arménien fonctionnel fondé au 9e siècle. Il est situé sur le territoire de la région de Kelbajar qui, selon une déclaration trilatérale adoptée par les dirigeants de l’Arménie, de la Russie et de l’Azerbaïdjan, doit être remise à Bakou.

 

 

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 8.  La Croix
 
16 novembre 2020
 

Haut-Karabakh : l’heure des adieux pour les Arméniens

Reportage
Dans le Haut-Karabakh, des milliers d’Arméniens fuient les territoires qui doivent être rétrocédés à l’Azerbaïdjan, comme le prévoit un accord de paix léonin signé le 9 novembre. La rétrocession doit s’étaler sur plusieurs semaines. Dans la région de Kelbadjar, où s’est rendu notre reporter, elle a été repoussée du 15 au 25 novembre.
par Pierre Sautreuil, envoyé spécial dans le Haut-Karabakh,
Dans une chapelle du monastère de Dadivank, des Arméniens venus prier se serrent les uns contre les autres. Ce 13 novembre, ils ont voulu se recueillir parmi les pierres ocre de cet ensemble millénaire, qui compte parmi les plus hauts lieux de l’Église apostolique arménienne dans le Haut-Karabakh. Beaucoup pleurent. Ils gardent les yeux fixés sur les cierges pour ne pas voir le marteau-piqueur qu’installent des ouvriers dans un coin de la pièce.
Trois jeunes femmes entament un hymne triste. Comme pour donner du courage, comme on tient la main à un mourant. Soudain la machine se met en marche. Le marteau-piqueur fracasse un pan de mur pour en détacher les khatchkar, croix de pierres richement sculptées que les autorités espèrent sauver.
Qu’adviendra-t-il du reste ? Le monastère se trouve dans la région de Kelbadjar, qui doit être rétrocédée à l’Azerbaïdjan, comme le prévoit l’accord de paix signé le 9 novembre. Tous craignent de voir les nouveaux arrivants détruire le lieu saint et ses khatchkar, comme cela fut fait dans la région voisine du Nakhitchevan.

Une cohabitation inconcevable

Gardien du monastère, le père Hovhannès entre dans une colère noire en voyant des soldats emporter sur leurs épaules les stèles délogées. « D’où est venu cet ordre ? hurle-t-il au téléphone. Le monastère reste à nous ou il passe aux Turcs ? Personne ne sait rien ! » Du fond de la vallée, monte la fumée d’une maison que son propriétaire a incendiée avant de partir. La cohabitation est inconcevable.
 
« Dans six mois, ce sera une très belle église albanaise », sourit Krikor (1), 30 ans, qui maquille sa tristesse en humour noir. Lui craint que les Azerbaïdjanais ne réécrivent l’histoire du lieu. Sur Twitter, le vice-ministre de la culture azerbaïdjanais, Anar Karimov, a affirmé que le monastère n’aurait pas été bâti par les Arméniens, mais par l’antique royaume des Albanais du Caucase : une manière de légitimer la reprise en main de ce territoire peuplé d’Arméniens, mais que le droit international reconnaît comme faisant partie de l’Azerbaïdjan.

L’émotion leur a coupé la voix

Comme beaucoup ici, Krikor et ses amis sont venus d’Erevan dès le petit matin pour admirer une dernière fois le monastère. Musiciens, ils avaient prévu d’organiser un concert pour dire au revoir à ce lieu chéri. Parvenus sur place, l’émotion leur a coupé la voix. Le requiem n’a pas eu lieu. Ils prient en silence, puis reprennent la route. La rétrocession de la région de Kelbadjar signe la fin de la continuité territoriale entre l’Arménie et le Haut-Karabakh. Deux corridors doivent être mis en place sous contrôle russe, mais nul ne sait quand.

Une fuite vers l’Arménie

Les musiciens décident de se rendre à Stepanakert, la capitale de la république de l’Artsakh, le nom de l’État non reconnu du Haut-Karabakh. Sur la route, ils croisent les voitures surchargées qui foncent vers l’Arménie, tables et chaises empilées sur le toit. Ici, un homme grimpe sur un pylône pour sectionner les lignes électriques. Là, des soldats démantèlent une station électrique. Sur les pentes escarpées, des hommes abattent les arbres par milliers. « Le bois, c’est tout ce qu’il reste à vendre quand on n’a plus rien », confie l’un d’eux, en chargeant les stères dans une fourgonnette. Derrière lui, une école incendiée finit de brûler.
« Je vous en prie, ne jugez pas les gens d’ici. » Dans la voiture, les musiciens oscillent entre tristesse et excitation. Des serments sont lancés : ils ne quitteront pas la région, même si la route devait être coupée. Ils s’arrêtent devant un monastère, prennent quelques photos, repartent.
 
Ils arrivent à Stepanakert à la tombée de la nuit. Un brouillard glacial colle à la capitale désertée. Une évacuation en catastrophe, le 7 novembre, a achevé de vider la ville de sa population. L’appel au retour lancé par le président de la république d’Artsakh, Arayik Haroutiounian, n’a été suivi que par quelques-uns. Certains ne sont revenus que pour récupérer des affaires avant de partir en Arménie.

La confiance est inexistante

À l’hôtel Armenia, le seul encore ouvert, le personnel s’en est allé. Reporters et officiers ont investi les lieux, ils se partagent des boîtes de conserve dans une salle de réception d’une saleté répugnante. La défaite se lit sur les visages des soldats ; le deuil aussi. Ils boivent à la santé des amis perdus.
La trêve a mis fin aux combats, mais la confiance est inexistante. Au nord-est, la région d’Agdam doit être rétrocédée à l’Azerbaïdjan d’ici au 1er décembre mais, pour l’heure, les soldats arméniens continuent d’occuper leurs positions au milieu de cette ville morte, dont la désolation ne date pas de ces dernières semaines.
Peuplée à la chute de l’URSS de 30 000 habitants, pour la plupart azéris, la ville d’Agdam avait été écrasée sous les bombes à l’été 1993, lors de la première guerre du Haut-Karabakh. La population a fui les combats. Agdam figure depuis au panthéon des plus grandes villes fantômes du monde.

« Ils ont déjà commencé à profaner la cathédrale »

« La guerre reprendra tôt ou tard, j’en suis sûr à 100 % », affirme un sous-officier arménien au milieu des ruines. Les positions azerbaïdjanaises ne sont qu’à deux kilomètres, les ennemis s’observent en silence. « Ce ne sont pas des êtres humains, ils ne respectent rien. Regardez, ils ont déjà commencé à profaner la cathédrale de Chouchi ! Nous n’avons jamais touché à la mosquée d’Agdam. »
 
De fait, les deux minarets érigés par les Perses au XIXe siècle sont toujours debout. Pour l’avoir infligée il y a trente ans, les Arméniens savent bien à quoi ressemble la loi des vainqueurs. Dans les villages de la région d’Agdam, leurs ressortissants ont déjà presque tous plié bagages.

« Nous nous battons depuis des siècles »

La plupart vont en Arménie. Seule une minorité semble décidée à rester dans les territoires que la république d’Artsakh est parvenue à conserver. « À quoi bon venir ici, il n’y a pas de travail, pas d’électricité », se lamente Lenoul Aïvazkian, 66 ans, dans la rue principale de Martakert, petite ville à une trentaine de kilomètres d’Agdam. Une colonne de blindés russes stationne devant les ruines de la salle des fêtes nommée « Moscou ». Partout autour, les bâtiments portent la trace de cruels bombardements.
Du doigt, Lenoul indique les quartiers construits à la hâte à la fin des années 1990, pour accueillir les réfugiés des pogroms anti-arméniens de Soumgaït et Bakou, en Azerbaïdjan. « Nous nous battons depuis des siècles. Peut-être les générations suivantes feront-elles la paix. Mais nous, comment peut-on vivre avec un peuple qui a pourchassé et massacré les nôtres ? »
 
Comment savoir avec certitude, dans ce pays de falaises et de montagnes, où passe l’invisible ligne administrative qui doit décider du sort des Karabakhtsis ? À la frontière entre les régions de Martakert et de Kelbadjar, des hommes portent à bout de bras un veau vers une bétaillère. Par sécurité, Seran Agadjanian, 39 ans, exfiltre vers l’Arménie une vingtaine de ses vaches. Il reviendra ensuite. « On ne sait pas si on peut faire confiance aux Russes ou aux autres pour assurer notre sécurité, déclare-t-il. On est en plein milieu de la limite, alors on reste. Si les Turcs osent venir ici, on les attend les armes à la main. »

Des habitations offertes aux flammes

Cinq kilomètres plus à l’est, Tcharektar brûle. Près de la moitié des habitations de ce petit village du district de Kelbadjar ont été offertes aux flammes par leurs propriétaires. Sur une table de jardin, à côté d’une maison dont le toit vient de s’effondrer, reposent les restes d’un ultime repas : du pain, du chou, des tomates, quelques fruits. Au sol gisent, à moitié calcinés, des outils de jardinage, quelques meubles, une bouteille de vodka vide, un singe en peluche. Dadivank est tout proche.
C’est ce samedi 14 novembre, en milieu d’après-midi, que le miracle tant attendu s’est enfin présenté aux portes du vénérable monastère, sous la forme de trois véhicules de transport blindés battant pavillon russe. Un lieutenant cagoulé annonce qu’un point de surveillance y sera installé, afin d’empêcher « toute atteinte aux biens ou aux droits de l’homme » dans les environs. La joie éclate sur les visages. Les héros du jour sont russes.

« Nous serons toujours là »

Le père Hovhannès s’avance pour exprimer sa reconnaissance, puis ordonne d’apporter de l’eau pour remplir les fonts baptismaux. Cinq adultes et leurs enfants se présentent dans l’église-cathédrale du monastère pour recevoir le baptême. La voix forte du prêtre résonne sous la coupole tandis qu’il oint les tempes, les oreilles, les contours de la bouche et les jambes des baptisés. La cérémonie achevée, il annonce qu’il ne quittera pas le monastère. « Si quiconque demain veut se faire baptiser, qu’il vienne. Nous serons toujours là. »

L’exode de Kelbadjar

La nouvelle de l’arrivée des soldats russes au monastère s’est vite répandue, sans pour autant endiguer l’exode. Sur la route de l’Arménie, le restaurant d’étape d’Archak Zakarian, 52 ans, est vide. Lui boit du thé à petites gorgées, le regard perdu dans un feu de cheminée. Les meubles et les fenêtres de son auberge ont déjà été envoyés en Arménie. Il ne brûlera pas son restaurant mais ne laissera rien derrière lui. La présence des Russes ne change pas sa décision. L’accord de paix ? Une trahison. « Nous sommes laissés à nous-mêmes. Personne n’est venu nous voir pour nous dire quoi faire. »
 
La nuit tombe. À l’approche de la frontière arménienne, les véhicules n’avancent plus que pare-chocs contre pare-chocs. Des tirs de kalachnikovs claquent dans l’air glacé. Quelques soldats tentent tant bien que mal de discipliner la caravane de voitures surchargées et de camions à bestiaux qui s’étire sur des kilomètres, interminable fleuve métallique qui zigzague vers l’amont, remontant entre les véhicules accidentés et les dépanneuses militaires, toujours plus haut, en direction de l’Arménie.
À l’écart de la route, des hommes regardent brûler une maison. Ils sont venus d’Arménie pour aider leur ami à empiler dans des camionnettes tout ce qui pouvait l’être. La tâche presque accomplie, le propriétaire des lieux a donné des instructions et a pris la route. Ses amis ont achevé le chargement des meubles sans lui, puis, la nuit venue, ont versé de l’essence dans la demeure. Une dernière cigarette. Un geste de la main. Le feu l’a engloutie en un instant.
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Des décennies de conflit

Région majoritairement peuplée d’Arméniens mais officiellement rattachée à l’Azerbaïdjan durant l’époque soviétique, le Haut-Karabakh a fait l’objet de violents affrontements à la chute de l’URSS, qui se sont soldés, en 1994, par la prise de contrôle de la région par l’Arménie nouvellement indépendante, en même temps que de sept régions azerbaïdjanaises.
En dépit d’efforts diplomatiques dans le cadre du groupe de Minsk(France, États-Unis, Russie), le conflit est resté dans une impasse.
De violents combats ont repris, le 27 septembre 2020, entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Après six semaines d’affrontements, le conflit s’est achevé le 9 novembre par la défaite de l’Arménie et la signature d’un cessez-le-feu.

 

(1) Le prénom a été modifié

 

 

 

 

 
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 9. Nouvelles d'Arménie
 
16 novembre 2020
 
 

« Je garde en mémoire le souvenir de Chouchi » : déclaration de Pierre Ouzoulias suite à sa rencontre avec Hasmik Tolmadjian

 

 

 

 

 

 

 

Déclaration de Pierre Ouzoulias, suite à sa rencontre avec l’ambassadrice Hasmik Tolmadjian :
Avec G.-L. Devinaz du groupe France-Arménie du Sénat, j’ai exprimé à l’ambassadeur d’Arménie toute ma solidarité pour le peuple arménien. La République d’Artsakh est meurtrie du terrible coup que lui ont porté la Turquie et l’Azerbaïdjan. Je garde en mémoire le souvenir de Chouchi et des statues du jardin du musée d’art contemporain. Je partage la désolation de ses habitants qui la quitte une nouvelle fois.
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De nouveau, ce petit peuple martyr du Proche-Orient est victime d’un ébranlement géo-stratégique qui le dépasse et dont il est la victime expiatoire.
Les démocrates qui soutiennent le peuple arménien depuis le génocide de 1915 doivent prendre conscience que l’expansionnisme néo-ottoman ne s’arrêtera pas là et menace directement l’existence même de l’Arménie.
Le discours de Jean Jaurès à la tribune de l’Assemblée nationale doit aujourd’hui interpeller notre conscience : « Ce qui importe, ce qui est grave, ce n’est pas que la brute humaine se soit déchaînée là-bas ; ce n’est pas qu’elle se soit éveillée. Ce qui est grave, c’est qu’elle ne s’est pas éveillée spontanément ; c’est qu’elle a été excitée, encouragée et nourrie dans ses appétits les plus féroces par un gouvernement régulier avec lequel l’Europe avait échangé plus d’une fois, gravement, sa signature ».

 

 

 
 
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10. France Inter
 
16 novembre 2020
 
 

Dans un monastère arménien, on arrache les croix avant l'arrivée des Azeris. Exode dans la Croix, le Figaro

 

 

 

 

On parle d'un exode… 

Dans le Haut-Karabakh où des Arméniens quittent leur villages qui vont être repris par l'Azerbaïdjan, ils s'en vont lis-je dans la Croix et dans le Figaro dans un défilé de voitures surchargées, de moissonneuses batteuses, de camions datant de l'Union soviétique, avant de partir souvent on a dévasté les champs, débité les arbres à la tronçonneuse, et sectionné les lignes électriques et brûlé, les maisons, et on dépouille aussi les vieilles église
Je lis dans la Croix cette cérémonie lugubre tenue vendredi dernier dans une chapelle du monastère de Davidank… Tandis que des jeunes femmes entonnaient un hymne triste comme on tient la main à un mourant, un marteau-piqueur fracassait un pan de mur pour détacher les Khatchkar, ces croix de pierre richement sculptées qu'il ne fallait pas abandonner à l'ennemi. Le lendemain samedi, trois véhicules blindés russes sont venus au monastère pour le protéger, alors le père Hovhannes a fait apporter de l'eau et a baptisé cinq familles en jurant que lui ne quitterait jamais son monastère -mais autour de lui l'exode s'est poursuivi… 
Dans Libération, on entend des soldats arméniens vaincus ruminer l'abandon et leur défaite, ils ont été submergés par les drones, et ils le vainqueur, les turcs qui dirigeaient les manœuvres… Et dans la bouche des vaincus on devinait le sourire de Monsieur Erdogan… 
On le retrouve, le Président Turc, dans un autre reportage de la Croix, à Chypre celui-là, qui évoque une autre guerre et un autre exode que la puissante Turquie avait provoquée. Hier, Monsieur Erdogan s'est rendu dans une ville fantôme, Varosha, une station balnéaire que ses 40000 habitants, chypriotes grecs avaient fui en juillet 1974, ils pensaient revenir vite, quarante-six ans ont passé et Varosha aux belles plages est une ville fantôme, mais le Président Erdogan a décidé de rouvrir cette ville de s'y promener un dimanche, de l'exploiter peut-être demain, et à la faveur de sa propagande, des anciens habitants ont revus leurs maisons vides, leurs églises sans cloches… 
Dans le Figaro ce matin, et sur le site du Monde aussi, brillamment, on analyse les stratégies et les rêves de Monsieur Erdogan qui, dit le Monde, déteste autant le modèle français que Ataturk, le fondateur de la Turquie moderne et laïque, l'admirait; on comprend mieux pourquoi ces lointaines tragédies sont les nôtres aussi. 
Dans une revue nommée "le Grand continent", on peut lire ce matin une interview-fleuve du Président Macron, l'adversaire honni du Président Erdogan, qui développe longuement ses conceptions de politique étrangère; il multiplie le mot "ruptures", et il dit à propos de la Russie et de la Turquie que ces pays pratiquent des stratégies "d'état de de fait": "ils n'ont plus peur d'une règle internationale, donc il faut trouver des mécanismes de contournement pour les encercler." 
Saura-t-il le faire, ce Président de la France laïque qui s'arcboute aussi sur notre modèle attaqué dans des pays musulmans, et qui se plaint -dans le New York timesde l'incompréhension anglo-saxonne envers nous après les attentats… Encerclons-nous ou sommes nous encerclés? 

On parle aussi de peur… 

Qui semble être la marque du jour et de notre pays. Nice-Matin raconte Maïthé, qui le jour de l'attentat contre la basilique de Nice était dans un tram, où un homme regardait les passagers en mimant des gestes d'égorgement, , Maïthé est restée jusqu'à sa station, Garibaldi, où elle est descendue suivie par l'homme. "J'ai prié pour voir les contrôleurs, ils étaient deux en haut des escaliers… Ils ont appelé du renfort, ils se sont mis à sept pour neutraliser, ils m'ont assise, ils ont renoué mes lacets, j'étais tellement choquée"… 
Le Courrier de l'Ouest nous dit cet homme qui samedi à Cholet, pris d'une crise mystique, a massacré trois personnes dans la rue, en tuant deux, parce qu'ils étaient le symbole de ceux qui ne croient pas en, dieu ne sont pas catholiques… 
Le Figaro consacre sa Une à la violence dont sont victimes les policiers, vingt fonctionnaires sont blessés chaque jour en mission, et le journal revient à Champigny-sur-Marne où le 10 octobre dernier le commissariat avait été attaqué juste après que la dernière brigade habituée au maintien de l'ordre ait levé le camp: un policier est persuadé que les jeunes qui passent en garde à vue font du repérage et notent les habitudes du commissariat… 
Et le dossier du Figaro fait écho au Journal de Saône-et-Loire qui raconte une embuscade tendue aux pompiers dans un quartier de Macon, et au Dauphiné qui analyse ce conflit qui rebondit sans cesse avec des jeunes qui dit le psychiatre Marcel Rulfo sont dans la toute-puissance… 
Mais à côté de ça, en, même temps, sont en ligne depuis la fin de semaine sur Street press et Mediapart , des récits venus du commissariat du XIXe arrondissement à Paris, qui racontent des policiers qui frappent et insultent, brutalisent humilient des hommes placés en garde à vue Dans le Parisien, j'ai des nouvelles de "tata Véro" la patronne de la brigade de nuit du commissariat de Massy, une major de 51 ans qui a été fauchée par une voiture dans la nuit de samedi à dimanche aux Ulis, dans une intervention dans un camp de gens du voyage. Ca va aller pour elle, ses hommes l'aiment bien, c'est sympa, "tata Véro". 

Et on parle enfin de transports… 

Dans un papier futuriste et précis des Echos, qui nous dit avant même l'achèvement du vaccin contre le Covid, comment son acheminement sera un défi logistique, historique jamais vu: amener 10 à 15 milliards de doses de vaccin dans le monde entier, donc par avion… Et si le vaccin de Pfizer est l'élu, il faudra transporter ce vaccin conditionné à -80 degrés, peut-on charger nos avions en glace carbonique, alors que ce produit est dangereux, et ne peut être embarqué qu'en petite quantité? Et cet article requinque, car quand on travaille on dissipe nos peurs. 
Dans le Monde, vous voyez revenir un aventurier du passé, Pierre Malinowski, un baroudeur archéologue qui a déjà trouvé les restes d'un général de Napoléon en Russie, on nous raconte ici comment il a mené des fouilles sur le mode du fait accompli pour retrouver la trace d'un tunnel dans l'Aisne à Craonne où 250 soldats allemands avaient trouvé la mort, emmurés asphyxiés en mai 1917. Avant pierre, son papa, Alain Malinowski, conducteur de métro et historien amateur avait porté la mémoire de ses malheureux, l'histoire est terrible et palpitante à la fois, je lis des noms Otto Lay, August Oehler Friedrich Schlechter, qui échappent à l'oubli.

 

 

 
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 11. Libération
 
15 novembre 2020
 
Un couple vient faire une dernière photo au monument 'Nous sommes nos montagnes' symbole du Karabakh, ce samedi 14 novembre.

 

 

 

 

Un couple vient faire une dernière photo au monument "Nous sommes nos montagnes" symbole du Karabakh, ce samedi 14 novembre. Adrien Vautier.Le Pictorium pour Libération

 

 

Azerbaïdjan, Russie et Turquie sont pour l’heure les trois vainqueurs du cessez-le-feu conclu avec l’Arménie. Mais Erevan n’est pas seul dans cette triple défaite, c’est aussi celle de la diplomatie occidentale.

  • Le Haut-Karabakh, un test géopolitique
Tribune. L’accord de cessez-le-feu au Haut-Karabakh a imposé des conditions léonines à l’Arménie, entérinant toutes les avancées territoriales de l’Azerbaïdjan (dont la prise de Chouchi, la deuxième ville du pays), et y ajoutant la cession par l’Arménie de tous les «rayons» azerbaïdjanais (dont les alentours du corridor de Latchin entre l’Arménie et le Karabakh) qu’elle conservait, depuis 1994, comme monnaie d’échange contre un statut pour la région.

 

 

 

 

 

Cet accord fait trois vainqueurs. L’Azerbaïdjan, qui, outre son gain en territoire, repousse sine die la fixation d’un statut. La Russie, conceptrice et garante de l’accord, rééquilibre sa position pro-arménienne de l’époque Eltsine, où elle avait puni l’Azerbaïdjan de n’être pas entré dans l’organisation de défense mise en place par Moscou. Elle regagne une présence militaire dans ce pays, du moins à sa bordure, à travers la force d’interposition de 2 000 hommes, qu’elle place sur la ligne de cessez-le-feu. La Turquie, enfin, reçoit un prix symbolique : la création d’un centre russo-turc d’observation du cessez-le-feu. Mais surtout elle réalise un objectif historique : la création d’un corridor entre l’Azerbaïdjan et le Nakhitchevan (province azerbaïdjanaise enclavée entre l’Arménie et la Turquie), qui crée une continuité entre les deux «frères» turcophones. L’Arménie n’était pas en état de refuser et Vladimir Poutine a détruit l’équilibre frontalier du Sud-Caucase que Staline avait confectionné à l’avantage de Moscou.
 
Trois vainqueurs, c’est beaucoup pour un accord en neuf points après un conflit de six semaines. Les frictions commencent sur le siège et le fonctionnement du centre russo-turc. Les Turcs le souhaiteraient près de la ligne de cessez-le-feu et paritaire. Les Russes l’éloignent et réduisent l’activité des Turcs à l’envoi de drones. Mais, pour l’un et l’autre, le plus important était d’afficher que leur entente produit une solution.
L’Arménie a été seule dans la bataille, mais, face à tant de vainqueurs, elle ne peut être seule dans la défaite. L’Occident est aussi du côté des perdants. Certes, on ne mettra pas sur le même plan le Canadien Justin Trudeau, qui a stoppé la livraison d’armes à Bakou, ou Emmanuel Macron, qui a nommé l’agresseur et son parrain, et Donald Trump, aux abonnés absents. Mais, au bilan, le «groupe de Minsk», copiloté par Washington et Paris avec Moscou, émanation de l’Organisation des nations unies (ONU), via l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), pour conduire le processus de paix, a été écarté, ce qui était l’un des buts de Recep Tayyip Erdogan, et une satisfaction secrète pour Vladimir Poutine.
Voilà pourquoi l’accord a été reçu froidement par la France. Le Président et le ministre des Affaires étrangères, tout en se félicitant du cessez-le-feu, ont insisté sur la différence entre «armistice» et «paix durable», et sur la nécessité d’examiner tous les paramètres, écrits et non écrits, de l’accord. On peut gager que celui-ci ne sera pas validé rapidement à l’ONU.
 
Au-delà d’une réaction de dépit, il est possible que cette prise de distance aille plus loin et marque le début d’une réponse plus cohérente à une situation caucasienne nouvelle sur deux plans.
D’abord, la «connivence compétitive» entre les Russes et les Turcs a été confirmée. Cet axe, qui a utilisé l’Arménie comme exemple de son efficacité, a pour but principal d’affaiblir l’Occident. La diminution de sa nocivité pourrait être une priorité de la «diplomatie active» de Joe Biden.
Desserrer l’étau russo-turc sur l’Arménie rejoint désormais directement les intérêts occidentaux. Mais cela ne se fera pas en un jour, comme une «révolution de couleur» à l’ukrainienne. Car, malgré les liens «culturels et historiques», qu’Emmanuel Macron a rappelés dans son jugement sur le cessez-le-feu, les dépendances de l’Arménie à l’égard de la Russie sont lourdes, militaires, mais aussi économiques, sociales, et encore accrues par le cessez-le-feu. Mais, après le choc de la défaite et du lâchage russe (avec un repêchage de dernière minute, comme en 1920, à l’époque face aux Turcs kémalistes), une partie de la société arménienne reconsidère les alliances. Elle avait déjà demandé, en 2012, un partenariat avec l’Union européenne en vain. Cette fois-ci, l’Occident ne paraît plus l’allié imperturbable de la Turquie, ce qui change la moitié de l’équation.
Trois niveaux d’intervention sont possibles. Premièrement, soutenir le Premier ministre, Nikol Pachinian, en butte aux tentatives de déstabilisation des tenants de l’ancien régime. Il incarne les progrès du pays, réalisés depuis deux ans et qui ont été salués par les instances internationales. C’est aussi pour l’affaiblir que Vladimir Poutine a tant cédé à Recep Tayyip Erdogan. Encore faut-il aider Nikol Pachinian, qui se place sous l’égide de l’éducation, de la science et de la démocratie à offrir de nouvelles perspectives à son peuple.
Deuxièmement, réunir sous un concept simple, compréhensible par les opinions, les éléments qui doivent compléter l’accord pour qu’il soit acceptable par l’ONU. Ce concept pourrait être «la symétrie, l’égalité de traitement dans tous les dossiers» : retour ou compensation de tous les réfugiés, levée de tous les blocus (même si l’état d’esprit en Arménie n’est plus à l’ouverture de la frontière avec la Turquie), procédure de pénalisation de tous les crimes commis dans le conflit (depuis le premier pogrom de Soumgaït, en 1988). Enfin, développer les deux tiers du Karabakh restés à l’Arménie, et que l’Azerbaïdjan n’est pas en situation de contester pour l’instant.
Les soutiens qu’ont obtenus les diasporas autour du mot d’ordre de«reconnaissance de la souveraineté de l’Artsakh» [dénomination arménienne du Haut-Karabakh, ndlr] indiquent la voie d’une reconnaissance de facto. Le modèle n’est pas le Kosovo, mais la république de Chypre, qui, après l’amputation de son territoire en 1974, a connu un essor économique rapide qui l’a menée jusqu’à l’entrée en Europe. Après l’aide urgente à la reconstruction, il faudra redynamiser les coopérations locales et transférer celles qui avaient pour sites les zones conquises par Bakou.
 
En France un mouvement de solidarité et de coopération avec le Karabakh s’était exprimé depuis 2018 à travers la signature de «chartes d’amitié» entre villes. Elles ont été annulées par la justice administrative, à la demande du gouvernement, selon lequel les mairies du Karabakh ne pouvaient être partenaires conventionnels de mairies françaises au nom de la «cohérence diplomatique». Cette diplomatie peut et doit aujourd’hui opérer un tournant. Il faut lever ces interdictions pour stimuler l’aide au développement éducatif et économique de ce territoire.
Michel Marian est l'auteur de : les Arméniens en 100 questions, à paraître chez Tallandier en 2021.

Michel Marian essayiste et membre du comité de rédaction de la revue «Esprit»

 
 

 

 

 

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12. Nouvelles d'Arménie
 
17 novembre 2020
 
 

Le Parlement de Montevideo reconnaît l’Artsakh

 

 

 

 

 

 

 

Le 13 novembre 2020, le Conseil départemental de Montevideo a exprimé son rejet total des attaques subies par l’Arménie et le Haut-Karabakh par la République d’Azerbaïdjan. Il a condamné le soutien apporté par « l’Etat génocidaire de Turquie qui a transféré des mercenaires pour combattre » et a reconnu la République d’Artsakh, appelant la communauté internationale à respecter son statut d’Etat indépendant.
l’Uruguay, se distingue une nouvelle fois de la communauté internationale en reconnaissant la République d’Artsakh comme il avait reconnu le génocide des Arméniens dès 1965.

 

 

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