OTC & les médias : Artsakh (Nagorny/Haut Karabagh)
1. Armenews, 31/10/2020
Robert O’Brien appelle à des Casques bleus scandinaves au Haut-Karabakh et exclut tout rôle turc
Toute force armée de maintien de la paix dans la zone de conflit du Haut-Karabakh ne devrait pas inclure les coprésidents du Groupe de Minsk, y compris les États-Unis, ou les pays voisins, a déclaré le conseiller américain à la sécurité nationale, Robert O’Brien, lors d’une réunion avec des représentants de la communauté arménienne à Los Angeles.
« Toute sorte de rôle de médiation ou de maintien de la paix turc est un échec pour les États-Unis, ainsi que pour l’Arménie. Nous pensons que les deux pays devraient accepter les casques bleus scandinaves, et nous travaillons avec les gouvernements scandinaves pour mettre sur pied une force de maintien de la paix qui pourrait être déployée dans la région pour maintenir le cessez-le-feu », a déclaré M. O’Brien.
Robert O’Brien, a déclaré que malgré la négation de la Turquie, il existe de nombreuses informations selon lesquelles la Turquie envoie des mercenaires syriens dans la zone de conflit du Haut-Karabakh.
« L’Azerbaïdjan a utilisé son argent du pétrole gagné au cours des dernières années pour acheter des armes plus avancées et ils ont le soutien technique et consultatif de la Turquie. Malgré les démentis turcs qu’ils m’ont faits personnellement, il y a des rapports crédibles selon lesquels la Turquie a déployé des combattants de l’opposition syrienne, l’armée nationale syrienne », a-t-il dit.
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2. Armenews, 31/10/2020
La Russie prête à aider Erevan si les combats s’étendent au territoire arménien
Erevan, 31 oct 2020 (AFP) – La Russie s’est déclarée samedi prête à fournir
l’assistance « nécessaire » à l’Arménie, en conflit avec l’Azerbaïdjan dans la
région sécessionniste du Nagorny-Karabakh, si les combats s’étendent au
territoire arménien.
L’annonce de Moscou, qui a renouvelé son appel à un cessez-le-feu, est
intervenue après que le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a demandé
plus tôt dans la journée au président Vladimir Poutine d’entamer des
consultations « urgentes » sur l’aide que pourrait fournir la Russie pour
assurer la sécurité de son pays.
La demande arménienne, qui laisse craindre une escalade dans le conflit,
est intervenue au lendemain de l’échec de nouveaux pourparlers entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan qui visaient à instaurer un cessez-le-feu.
La Russie dispose d’une base militaire à Gumri, la deuxième ville
d’Arménie. Elle est également liée à Erevan par un traité de sécurité
collective, mais a affirmé par le passé qu’il ne s’étendait pas à la région du Nagorny Karabakh.
"La Russie apportera à Erevan toute l’assistance nécessaire si les
affrontements prennent place directement sur le territoire de l’Arménie", a
indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué.
Parallèlement, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a
précisé à la télévision russe que « les formats concrets » d’une assistance
seraient discutés.
Dans une lettre à Vladimir Poutine, M. Pachinian a affirmé samedi matin que
les combats se rapprochaient des frontières arméniennes et accusé à nouveau la Turquie de soutenir l’Azerbaïdjan.
Invoquant les bonnes relations entre les deux pays et le traité d’amitié,
de coopération et d’assistance mutuelle lie les deux pays depuis 1997, il a
appelé Moscou à l’aide.
"Le Premier ministre arménien a demandé au président russe d’entamer des
consultations urgentes dans le but de déterminer la nature et la quantité de
l’aide que la Fédération russe peut apporter à l’Arménie pour assurer sa
sécurité", a annoncé la diplomatie arménienne.
– Intervention risquée –
Carey Cavanaugh, un ancien ambassadeur américain, estime qu’une
intervention militaire étendue dans le conflit n’est pas dans l’intérêt de
Moscou.
"C’est impossible de mesurer les risques mais une intervention de troupes
russes ou turques à ce stade conduirait à une escalade significative dans le
conflit", a-t-il affirmé à l’AFP.
Selon lui, l’armée russe "pourrait faire sortir des troupes de leur
garnison à Gumri pour assurer la sécurité de la frontière" arménienne, ou
porter assistance à des réfugiés fuyant les combats.
Contacté par l’AFP, Hikmet Hajiyev, conseiller diplomatique du président
azerbaïdjanais Ilham Aliev, n’a pas souhaité faire de commentaires.
Le ministre arménien des Affaires étrangères, Zohrab Mnatsakanian, et son
homologue azerbaïdjanais, Djeyhoun Baïramov, s’étaient rencontrés vendredi à
Genève pour tenter sans succès de trouver une issue à la crise.
Vendredi soir, les médiateurs français, russes et américains, réunis au
sein du « groupe de Minsk », ont indiqué que les belligérants avaient convenu
d’un certain nombre de mesures, notamment l’engagement à "ne pas viser
délibérément les populations civiles ou des cibles non militaires".
Toutefois, le « ministère de la Défense » du Nagorny Karabakh a accusé samedi
l’Azerbaïdjan d’avoir bombardé la capitale de cette région sécessionniste,
Stepanakert, et la ville stratégique proche de Choucha.
Le ministère a fait état « de blessés parmi les civils à Choucha ». Pour sa
part, Bakou a rejeté les accusations de bombardements sur Stepanakert.
Depuis le 27 septembre, les forces azerbaïdjanaises et celles du Nagorny
Karabakh soutenues par Erevan s’affrontent à nouveau. Jusqu’ici, trois
tentatives de trêve humanitaires ont volé en éclats.
Selon des bilans partiels, ces affrontements, les pires depuis une guerre
au début des années 1990, ont fait plus de 1.250 morts. Le président Poutine,
dont le pays fait office d’arbitre dans la région, a lui évoqué la semaine
dernière un bilan s’approchant de 5.000 morts.
Le Nagorny Karabakh a fait sécession de l’Azerbaïdjan dans les années 1990
à l’issue d’une guerre ayant fait 30.000 morts et des centaines de milliers de
déplacés.
Par Mariam HARUTYUNYAN
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3. Armenews, 31/10/2020
L’Arménie demande l’aide de la Russsie pour assurer « sa sécurité »
Erevan, 31 oct 2020 (AFP) – Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a
demandé samedi au président Vladimir Poutine d’entamer des consultations
« urgentes » sur l’aide que pourrait fournir la Russie pour assurer la sécurité
de son pays, en conflit avec l’Azerbaïdjan sur le Nagorny Karabakh.
Cette annonce, de nature à provoquer une escalade dans le conflit, est
intervenue au lendemain de l’échec de nouveaux pourparlers entre l’Arménie et
l’Azerbaïdjan qui visaient à instaurer un cessez-le-feu.
"Le Premier ministre arménien a demandé au président russe d’entamer des
consultations urgentes dans le but de déterminer la nature et la quantité de
l’aide que la Fédération russe peut apporter à l’Arménie pour assurer sa
sécurité", a annoncé le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
La Russie dispose d’une base militaire en Arménie. Elle est liée à Erevan
par un traité de défense, mais a affirmé par le passé qu’il ne s’étendait pas
à la région du Nagorny Karabakh.
Dans sa lettre, M. Pachinian a affirmé que les combats se rapprochaient des
frontières arméniennes et accusé à nouveau la Turquie de soutenir l’Azrbaïdjan.
Invoquant les bonnes relations entre les deux pays et un traité d’amitié,
de coopération et d’assistance mutuelle qui les lie depuis 1997, il a appelé
Moscou à l’aide.
Le ministre arménien des Affaires étrangères, Zohrab Mnatsakanian, et son
homologue azerbaïdjanais, Djeyhoun Baïramov, s’était rencontrés vendredi à
Genève pour tenter sans succès de trouver une issue à la crise qui a fait plus
de 1.250 morts en un peu plus d’un mois.
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4. Armenews, 31/10/2020
Interview du Dr J. M. Ekhérian
« Je confirme avec certitude l’emploi d’armes non conventionnelles »
Nouvelles d’Arménie Magazine : Pouvez-vous nous expliquer dans quel cadre vous êtes partis à Stépanakert, avec qui ?
Dr Jean-Michel Ekhérian : Nous sommes parti dans un élan tout a fait naturel le plus rapidement possible dès que nous avons pu nous dégager de nos obligations professionnelles compte tenu de la gravité de la situation.
Comme nous sommes en contact permanent avec l’hôpital par conséquent les médecins et chirurgiens il était simple de connaitre les besoins. Nous sommes parti à 3 : Chanth BALIAN chirurgien urologue et viscéral, Aram TER MINASSIAN anesthésiste réanimateur, et moi-même anesthésiste réanimateur. Notre association s’appelle HAY-MED.
NAM : Quelle est la situation sanitaire et médicale sur place (covid+guerre ?)
JME L’organisation est parfaite, chacun connait son rôle, il n’y a aucun éclat de voix, aucun énervement, c’est comme une mécanique rodée bien huilée. Le fait de les connaitre tous nous a permis de nous intégrer au programme opératoire en suivant les directives organisationnelles. Des médecins et chirurgiens d’Arménie et de Russie étaient là aussi et nous nous sommes très vite liés d’amitié. L’ambiance était sérieuse mais la gravité de la situation n’entravait en aucun cas l’efficacité de l’équipe/Les blessés arrivaient par groupe pouvant aller jusqu’à 10 et nous pouvions opérer jusqu’à 8 patients simultanément. Le COVID était présent bien entendu. On pourrait le chiffrer à environ 20% du personnel soignant et les mesures barrière étaient réduites à leur plus simple expression. Le confinement de groupe favorise la transmission dans le Bunker mais fort heureusement il n’y a eu aucun COVID grave. L’absence de test faciles à effectuer du fait de la charge de travail sous évalue certainement cette proportion.
NAM : Qu’avez-vous pu faire concrètement ?
JME : nous avons amené du matériel, participé aux soins par le biais des interventions chirurgicales et de la réanimation. Cela a été aussi l’occasion d’échanger des points de vue et de donner des conseils.
NAM : Pouvez-vous témoigner de l’usage d’armes non conventionnelle ? Quels les dégâts produisent-elles ?
JME : Il est évident que les blessures occasionnées sont nouvelles et qu’elles occasionnent des dégâts considérables à l’intérieur du corps. Les bombes à fragmentation produisent des éclats épais avec une énergie cinétique élevée et des bords dentelés. Après être rentrés dans le corps ils cheminent sur 10 à 15 cm déchirant des tissus qui peuvent être des gros vaisseaux ou tout autre organe. Les cassettes à sous munitions criblent de balles les victimes. Je confirme avec certitude l’emploi d’armes non conventionnelles.
5. Le Point, 29/10/2020
Le bloc-notes
L’Europe doit venir au secours de l’Arménie
De Bernard-Henri Lévy
Je sais bien que nous sommes requis par la lutte contre le virus. Et c’est presque faire preuve d’incivisme, pour ne pas dire d’impiété covidienne, que de prétendre, par les temps qui courent, regarder plus loin que le bout de son nez et de son masque.
Reste qu’un événement terrible est en train de se produire, aux marches de l’Europe, sous nos yeux.
Et cet événement qui a tant de mal à accéder à nos consciences c’est, depuis quelques semaines, la nouvelle guerre entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.
Je récapitule.
Tout se joue dans une bande de terre, au coeur du Caucase, qui se nomme le Haut-Karabakh et qui, peuplée de 150 000 montagnards, à 90 % arméniens, est disputée par l’Azerbaïdjan voisin.
Celui-ci, depuis vingt-cinq ans que ce minuscule territoire a eu le front de s’autoproclamer indépendant et d’exprimer le désir de se rattacher à son autre voisin, l’Arménie, y mène une guerre de faible intensité qui a fait 30 000 morts.
Comme toujours quand la haute politique décroît, voici la basse politique, c’est-à-dire le triomphe de la pure volonté de puissance, qui croît, prospère et fait que la guerre larvée tourne à un affrontement de grande ampleur et, au demeurant, inégal qui voit des pluies de drones s’abattre sur les tranchées, mais aussi sur les écoles, les hôpitaux, les églises, du Haut-Karabakh et, parfois, de l’Arménie elle-même.
Arrive Recep Tayyip Erdogan qui, tout à sa suraffirmation de surmâle surjouant ses rodomontades, ses insultes à Macron et son nouveau rôle de calife et protecteur des musulmans offensés, voit dans la nation azérie une « nation soeur » appelée à jouer un rôle d’autant plus décisif dans la reconstitution de son empire qu’on y parle une langue voisine du turc – et voit la petite nation arménienne, à l’inverse, comme une terre en trop dont le voisinage, l’altérité et la très ancienne mémoire chrétienne sont une injure à son espace vital, son « Lebensraum », néo-ottoman.
Et c’est ainsi que les Arméniens, sous-équipés, presque seuls, alliés à une Russie qui n’en continue pas moins de livrer des armes à leurs adversaires et voyant apparaître des chiens de guerre ramenés par Ankara des fronts syriens et libyens, se souviennent qu’ils ont inauguré l’atroce XXe siècle en étant les victimes du premier génocide de l’Histoire moderne ; songent que les Turcs, auteurs de ce génocide, eurent la lumineuse et monstrueuse idée d’une négation qui fut comme un redoublement du crime et dure jusqu’aujourd’hui ; et, sur le front d’Agdam comme à Erevan, dans les boyaux de fortune où des centaines de jeunes patriotes et de volontaires internationaux sont ensevelis sous les orages d’acier comme dans les grandes métropoles où leurs aïeux ont jadis trouvé asile, vivent dans la hantise de renouer avec le martyre.
Alors, il se trouvera toujours de mauvais esprits pour tenter de ratiociner.
Et l’on entend les éternels M. de Norpois expliquant que le Haut-Karabakh, depuis qu’un certain Staline, alors commissaire aux nationalités, le rattacha, en 1921, à Bakou, appartient, en droit international, à l’Azerbaïdjan.
La vérité c’est que l’on est pétrifié par la perspective de l’éternel retour du pire.
Et l’on ne peut pas être Européen, vraiment Européen, c’est-à-dire habité par l’idée d’une Europe fondée sur le « plus jamais ça » de la guerre et de l’extermination, sans prendre parti pour l’Arménie.
On peut le dire à la façon de Villon et de ses « frères humains » qui ont failli, là, ne pas survivre.
À celle d’Hugo dont la raison lyrique a établi que le souci de soi ne vaut qu’habité par le « sanglot », le « sacrifice », le « tombeau », des plus infortunés.
On songe, en particulier quand on est juif, à cette « solidarité des ébranlés » théorisée par Jan Patocka et faisant devoir aux survivants de tous les grands massacres de se rappeler l’obscure et ténébreuse fraternité qui les unit. L’Arménie n’est pas seulement l’Arménie.
C’est son nom qu’avaient aussi en tête ceux qui, au lendemain de la Shoah, forgèrent la notion de crime contre l’humanité.
C’est l’un des lieux, non seulement du monde, mais de l’esprit qui ont fait office de creuset pour ce qu’il est convenu d’appeler, depuis, la conscience universelle.
Et le peuple qui y séjourne est l’un des rares qui, parce que s’est jouée, dans leur histoire, une part du destin de l’humain, sont un peu plus grands qu’eux-mêmes.
Pour ces raisons, ma doctrine est faite.
Et sauf, encore une fois, à quitter les anciens parapets de pensée qui forment et fortifient l’âme de l’Europe, nous n’avons d’autre choix que de dire : l’État-refuge des rescapés du premier génocide, ce petit pays douloureux et tellement plus vieux que son âge, a, lorsqu’il est au bord de l’abîme, par principe, eh oui, par principe, droit à notre entier soutien.
J’ajoute que les déclarations de principe, en ces matières, ne suffisent pas.
Et la disproportion des forces est telle qu’il faut aussi aider les descendants des victimes à faire face, cette fois, à leurs bourreaux.
Le monde n’entendit pas, en 1936, les Républicains réclamant un soutien résolu à l’Espagne.
Il finit par écouter, mais si tard, ceux qui voulaient, en 1992, que l’on sauve les musulmans de Sarajevo bombardé.
Puisse-t-il se rappeler la leçon et ne pas laisser, encore, la loi du plus fort l’emporter : au regard de l’Histoire, cette éternelle tragédie qui n’est une excuse que pour les cyniques et les niais, se ranger aux côtés de l’Arménie est un impératif métaphysique, moral et politique.
6. The Washington Post, 30/10/2020
As Armenia battles with Azerbaijan, a food front
Burger chain franchisees use social media to weigh in on Nagorno-karabakh
BY RICK NOACK
In Azerbaijan, as elsewhere, Mcdonald’s and Burger King stores tend to use their Instagram accounts to post photos of burgers and fries. But a few weeks ago, the tone took a turn.
After military clashes between Azerbaijan and Armenia broke out last month, fast-food franchisees began to weigh in — on behalf of Azerbaijan.
The posts, which have since been removed, came amid the worst outbreak of fighting since the 1990s over the contested Nagorno-karabakh region, a breakaway ethnic Armenian enclave within the internationally recognized borders of Azerbaijan. Fighting there left some 30,000 people dead and more than 1 million displaced before the sides agreed to a cease-fire in 1994, but flare-ups have broken out since.
The enclave functions largely as an independent state, controlled by political factions linked to Armenia. But Azerbaijan sees it as occupied territory.
“Every inch of the homeland is one and indivisible,” one Instagram post on a verified Mcdonald’s account read, alongside a map showing Nagorno-karabakh within Azerbaijan.
“Victory is with you, Azerbaijani Soldier!” a Burger King branch posted. “Karabakh is Azerbaijan.” The account, while not officially verified by Instagram, appeared to host promotional materials dating back years, to its opening.
In a statement Tuesday to The Washington Post, a Mcdonald’s corporate spokesperson confirmed that a franchisee in Azerbaijan had removed the social media content in question but would not respond to questions about the company’s policies on political speech on the part of local stores.
Burger King did not respond to a request to confirm that the account in Azerbaijan belonged to a local partner. But shortly after The Post contacted the corporation, the posts — some of which had been online for weeks — became inaccessible. The Mcdonald’s posts disappeared as well.
“Franchises are set up in order to give freedom to a franchisee to respond to very local market needs,” said Daniel Korschun, an associate professor of marketing at Drexel University. But “this is very clearly a situation where this statement in this very local market can reverberate all through the franchise network.”
In a statement Tuesday, the Armenian National Committee of America-western Region said it was “shocked and appalled by the recent statements made by Mcdonald’s” and called “upon the Armenian diaspora to #Boycotthate until action is taken by Mcdonald’s on this matter.”
An international audience unused to seeing major brands weigh in on fraught regional conflicts reacted with incredulity. But analysts say many international businesses have begun to see similar situations more often.
Like other U. S. corporations with large global footprints, McDonald’s and Restaurant Brands International, which owns Burger King, mostly rely on local franchisees to operate restaurants. While most global corporations have contract clauses that allow them to terminate contracts or take other actions against local partners for causing reputational harm, the language often focuses on food standards — not, conventionally, the risky political territory that some businesses have found increasingly challenging to navigate in recent years, Korschun said.
“We’re going to see more and more franchisees pulling franchisers into controversial political issues,” said Korschun, citing tensions in Hong Kong and between China and Taiwan.
In 2018, the local owner of a hotel in Taiwan cut ties with American hospitality company Marriott after it changed the hotel’s listing to “Taiwan, China,” Agence France-presse reported.
7. The Globe and Mail (Canada), 30/10/2020
Canadian equipment used in air strikes against Armenians
BY STEVEN CHASE
The Globe and Mail sent a photographer to an Armenian military compound on Thursday to take photos of pieces of a downed drone. One soldier held up the Oct. 29, 2020, front page of an Armenian newspaper, Hayastani Hanrapetutiun, to show what date the photos were taken.
The Armenian government has pieces of a Turkish-made military drone that includes air strike-targeting gear manufactured in Canada, The Globe and Mail has independently confirmed.
This equipment is at the centre of allegations that Azerbaijan is using drones in the conflict over Nagorno-Karabakh that contain restricted Canadian military technology originally approved for export to Turkey but then diverted to Azerbaijan. Turkey is a staunch ally of the Azerbaijanis.
The Globe sent a photographer to an Armenian military compound Thursday to take photos of the pieces of the downed drone in order to obtain first-hand evidence of what exactly the Armenians have obtained.
A leading arms researcher on exports of this targeting gear, Kelsey Gallagher, said the equipment that the Armenians possess in the photos is in fact an MX-15D imaging and targeting device made by L3Harris Wescam of Burlington, Ont.
“While we know this is a Wescam sensor just by looking at the turret itself, the inclusion of ‘CMX-15D’ on the serial code of the base plate makes it irrefutable this is Canadian-made hardware,” he said. “The same base plate is also branded with ‘Baykar,’ the manufacturer of the Turkish Bayraktar TB2 drone.”
Baykar has for some time included Wescam gear on its TB2 drones to perform surveillance and execute airstrikes.
Arms-control advocates and Armenian Canadians say The Globe photographs offer more corroborating evidence that military equipment approved for export to Turkey has been diverted to Azerbaijan.
They are calling on the Canadian government to cancel all outstanding export permits that enable the shipment of L3Harris targeting and imaging equipment to Turkey.
Armenian Prime Minister Nikol Pashinyan last week announced that his government had obtained fragments of a Turkish Bayraktar drone that he said was among a number shot down in the Nagorno-Karabakh clash. He said in a Facebook post that this included an “ultramodern optical unit” from Canada. Prime Minister Justin Trudeau’s government has twice declined requests from The Globe to address his comments.
Canada is obliged under domestic law and the global Arms Trade Treaty to prevent, detect and stop the diversion of military goods to users other than intended customers. It is also compelled to stop exports of such restricted goods that are shown to be used to harm civilians.
A month ago, Ottawa announced that the department of Global Affairs would investigate allegations from Armenian Canadians and arms-control researchers that Canadian military exports to Turkey had been diverted to Azerbaijan.
One week later it suspended permits enabling exports of L3Harris Wescam equipment to Turkey. This came after The Globe reported that the federal government had issued export permits this May for seven MX-15D devices be shipped to Turkey despite a moratorium on approving permits for new arms shipments that Ottawa first enacted in late 2019.
The Globe sent several photos Thursday to the Prime Minister’s Office and to the office of Foreign Affairs Minister François-Philippe Champagne, and asked them whether they were prepared to cancel the export permits, whether they would release the result of the Global Affairs investigation and whether Mr. Trudeau would apologize to Armenia’s Mr. Pashinyan.
In response, the government would only say that its investigation is continuing. “Canadian officials are investigating allegations made regarding the use of Canadian technology in the conflict and will continue to assess the situation,” Global Affairs spokesman Michel Cimpaye said in a statement.
Shahen Mirakian, co-president of the Armenian National Committee of Canada, said his group has been urging Mr. Champagne to dispatch a government representative to Armenia to verify that L3Harris Wescam gear is in these Turkish drones. He said that Canada is represented in Armenia through the Canadian embassy in Russia.
“We have asked Minister Champagne to send Canadian officials from Moscow to view the drone first hand and obtain all relevant information, but the minister has not provided a clear answer.”
Mr. Champagne’s office said they are considering it, Mr. Mirakian said, but have not confirmed they would send someone.
“We want to believe that Global Affairs Canada is conducting the investigation in good faith and in the best interests of all Canadians, but it is hard to sustain that belief when they refuse to take the best opportunity they are provided to collect evidence,” Mr. Mirakian said. “We remain hopeful that we will soon be made aware of the concrete steps taken to advance the investigation.”
Asked for comment, the embassy of Azerbaijan in Ottawa did not address the diversion of drones but said “the reason the Republic of Azerbaijan uses [them] is in order to minimize … civilian casualties. ” It said it only uses drones against “military infrastructure that is illegally located by Armenian army in Azerbaijani territories.”
L3Harris Technologies, the U.S. parent company of L3Harris Wescam, said it abides by all export rules and regulations.
“L3Harris fully adheres to all defence export rules and regulations set by the Canadian government and will continue to work with the appropriate agencies,” the company said in a statement. “The company took immediate action to comply with Canada’s suspension of export permits to Turkey,” it added.
The Globe sent several of the photos to the Turkish embassy in Ottawa. Its reply did not address whether it had diverted restricted Canadian technology to Azerbaijan.
Instead it alleged that Armenia is at fault in the conflict over Nagorno-Karabakh and said Azerbaijan has a right to defend its territorial integrity
“We believe that The Globe and Mail is missing the core of the issue … that 20 per cent of Azerbaijan’s territory is under illegal Armenian occupation for three decades,” the Turkish embassy said.
In the photos taken for The Globe Thursday, soldiers posed with the drone fragments and sensor. One soldier held up the Oct. 29, 2020, front page of an Armenian newspaper, Hayastani Hanrapetutiun, to show what date the photos were taken.
Mr. Gallagher, a researcher with Project Ploughshares, an arm-control group in Waterloo, Ont., has been researching L3Harris Wescam technology and exports to Turkey for more than a year. He produced a report on the matter in late September. He said the photos “go a long way in proving that security forces of Nagorno-Karabakh indeed have possession of a Wescam sensor used by Azeri forces in the conflict” and that “Canadian weapons systems are appearing where they weren’t authorized.”
Mr. Gallagher said “it is also noteworthy that the [pictured drone] airframe includes markings of the Azerbaijani Air Force, further indicating that these weapons are being used in the Nagorno-Karabakh conflict.” In addition, he said that the pattern of the camouflage uniforms worn by the soldiers in the photo “appears to be consistent” with the pattern used by Armenian forces.
Mr. Gallagher said it’s important to have the Armenian soldiers and newspaper in photos taken to help corroboration.
“Downed weapons systems are frequently photographed in conflict zones, but it can be difficult to judge the veracity of claims that they were taken in a specific location, or on a certain date. For instance, photos of a downed drone in Iraq uploaded today could have just as easily been photographs from northern Syria a couple years ago. This all has implications when it comes to arms control.”
8. Marianne Magazine, 30/10/2020
DIPLOMATIE DU CAVIAR ET ESPRIT REVANCHARD
Outre l’aide militaire de la Turquie et la répression féroce de toute opposition, l’actuel chef azéri s’appuie sur un récit victimaire patiemment construit au fil des années pour justifier son attaque dans le Haut-Karabakh, région majoritairement arménien
PAR ANNE DASTAKIAN
ESCALADE Le président Aliev entend reprendre la région par la force tout en accusant les Arméniens d’avoir ouvert les hostilités, rompu trois cessez-le-feu et commis des crimes de guerre. Ci-dessus : patrouille des forces armées azerbaïdjanaises près du village de Talish, dans la région de Martakert.
Quand l’Union soviétique se disloquait, en 1991, le droit à l’autodétermination des peuples opprimés avait le vent en poupe face au principe de l’intangibilité des frontières. Hormis Moscou, nul n’aurait songé à nier le droit des pays baltes – illégalement annexés par l’URSS en 1945 – à proclamer leur indépendance. Ou celui des pays du Caucase et de l’Asie centrale à voler de leurs propres ailes après soixante-dix ans de soviétisme et de russification. Mais, quand certaines minorités ethniques locales voulurent à leur tour s’émanciper, elles se heurtèrent au niet catégorique de ces nouveaux États : refus de la Russie à la Tchétchénie, de la Géorgie à l’Abkhazie et à l’Ossétie du Sud, de la Moldavie à la Transnistrie, et de l’Azerbaïdjan aux Arméniens du Haut-Karabakh. Ces conflits sont pour la plupart restés gelés depuis lors. Jusqu’au réveil sanglant du Haut-Karabakh, le 27 septembre.
Dirigé d’une main de fer par le président Ilham Aliev, qui a succédé en 2003 à son père, Gueïdar, ancien chef du KGB local élu président en 1993, l’Azerbaïdjan n’a pas arrêté, depuis le cessez-le-feu de 1994, de faire valoir ses droits sur le Haut-Karabakh. Bakou estime que l’enclave, rattachée à l’Azerbaïdjan par Staline en 1921, lui revient de droit, bien qu’elle soit très majoritairement peuplée d’Arméniens, qui s’étaient massivement prononcés pour l’indépendance lors d’un référendum en 1991. Un vote qui faisait suite à des pogroms anti-Arméniens perpétrés en Azerbaïdjan – à Soumgaït en 1988, puis à Bakou en 1990 –, qui les avaient conduits à quitter ce pays.
Diabolisation
Aussi riche en pétrole que pauvre en démocratie, la dynastie des Aliev cultive, depuis 1994, un discours nationaliste, revanchiste et belliqueux à propos du Haut-Karabakh pour galvaniser sa population contre l’« occupant » arménien. À tel point qu’en 2004, lors d’un stage organisé à Budapest par l’Otan dans le cadre de son partenariat pour la paix, le jeune officier azéri Ramil Safarov assassinait de 16 coups de hache un collègue arménien, Gurgen Margarian, pendant son sommeil. Après avoir, dans un premier temps, présenté ses « regrets » pour ce crime et ses condoléances à la famille de la victime, Bakou changea de stratégie, organisa une collecte pour soutenir Safarov, et dépêcha psychiatres et avocats pour le défendre, affirmant qu’il souffrait d’un syndrome post-traumatique dû à l’occupation du Karabakh. En vain. Le 13 avril 2006, Safarov était condamné à la prison à perpétuité, avec une peine incompressible de trente ans. Six ans plus tard, en septembre 2012, Bakou, fort de ses pétrodollars, obtenait son extradition et l’accueillait en héros. Gracié par le chef de l’État, il fut promu commandant, se vit offrir une maison au centre de Bakou et payer huit années de solde.
Largement couverte par la presse internationale, cette affaire valut à Ilham Aliev une brève traversée du désert. Un impair qu’il pensa surmonter par un somptueux concours de l’Eurovision, organisé à Bakou trois mois plus tard. Mauvaise pioche. En prévision de la fête, Aliev fit arrêter tout ce que le pays comptait d’opposants. L’année suivante, c’est l’écrivain Akram Aylisli qui subit les foudres du président : pour avoir écrit Rêves de pierre, un récit relatant une amitié entre voisins arménien et azéri dans le Haut-Karabakh, et décrit les exactions infligées aux Arméniens, le septuagénaire fut qualifié de traître, déchu de son titre d’artiste national, tandis que sa femme et son fils perdaient leur travail. Restait à récupérer le Haut-Karabakh. Pour ce faire, Aliev chercha à rallier à sa cause les pays coprésidents du groupe de Minsk – la France, la Russie et les États-Unis – au sein de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) , chargé de trouver une issue pacifique au conflit. Le président azéri visa particulièrement la France, pays d’accueil de la plus grande diaspora arménienne d’Europe, issue du génocide de 1915 dans l’Empire ottoman. Reprenant le discours négationniste de son allié turc sur le sujet, Bakou imagina une contre-offensive osée : dénoncer un prétendu « génocide » commis par les Arméniens pendant la guerre du Karabakh. Depuis 2012, une commémoration annuelle est ainsi organisée par certaines ambassades azéries en mémoire de civils morts dans des circonstances controversées à Khodjaly. Aucun historien ou juriste sérieux n’a légitimé dans ce cas le terme de « génocide ». Qu’importe ! À Paris, le Cercle européen d’Azerbaïdjan organise en février un concert en l’église Saint-Roch. Quoique gratuit, l’événement n’attire pas foule. Rien de bien grave. Bakou a des relais parmi les élus. En mars 2017, le député de l’Oise LR Jean-François Mancel, président de l’Association des amis de l’Azerbaïdjan, a soumis une question écrite au secrétaire d’État chargé des Anciens Combattants afin que « le génocide de Khodjaly soit commémoré » : « Le génocide de Khodjaly est la page la plus terrible et tragique de l’histoire de l’Azerbaïdjan. Cette tragédie de la fin du XXe siècle est l’un des graves crimes commis non seulement contre le peuple azerbaïdjanais, mais aussi contre l’humanisme et l’humanité. » À l’évidence inspiré de l’argumentaire azéri, le plaidoyer de Jean-François Mancel fut poliment renvoyé à une commission d’historiens.
La stratégie de Bakou, visant à gagner les faveurs de politiciens étrangers et d’employés d’organisations internationales en les couvrant de coûteux présents, a été décrite dans un rapport du thinktank European Stability Initiative et baptisée « diplomatie du caviar ». Plusieurs dirigeants du Conseil de l’Europe se sont ainsi laissé séduire, au point d’adouber des élections azéries pourtant notoirement truquées. Quand Élise Lucet, dans un numéro de l’émission « Cash investigation » de 2017, qualifia l’Azerbaïdjan de « dictature », Bakou en prit ombrage et l’attaqua en diffamation. Sans succès.
Est-ce l’échec du processus de paix ou celui de son puissant lobbying qui a poussé le président Aliev à vouloir reprendre le Haut-Karabakh par la force ? Ou est-ce l’appui décisif de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan ? Niant toute participation au conflit de militaires turcs ou de supplétifs syriens, Aliev poursuit sa campagne de diabolisation des Arméniens : il les accuse d’avoir ouvert les hostilités, puis rompu trois cessez-le-feu et de commettre des crimes de guerre. Tout en affirmant voir dans le futur Karabakh « une partie prospère et sûre de l’Azerbaïdjan, où les Azerbaïdjanais et les Arméniens vivront en harmonie, en paix et en dignité ». A voir.
9. Marianne Magazine, 30/10/2020
LA DOUBLE MENACE VENUE DES AIRS
Après quatre semaines de conflit, les Arméniens du Haut-Karabakh appréhendent le spectre de la défaite. En plus des cessez-le-feu non respectés, soldats et civils font face à deux dangers invisibles et meurtriers : les drones « suicides » et … le Covid.
PAR MORGANE BONA,
EN PLUS DES BLESSÉS victimes des affrontements, les soignants doivent prendre en charge les patients atteints du Covid, comme ici dans l’hôpital civil de Stepanakert. Depuis un mois, le nombre de porteurs du Covid-19 a été multiplié par cinq, pour atteindre 23 000 cas positifs en Arménie.
Sous l’action des pinces, le craquement des crânes résonne dans la salle d’opération. Une vingtaine de médecins, d’infirmières et d’aides-soignantes s’affairent pour sauver deux jeunes soldats. Ils ont 25 ans, tout au plus, et portent encore leur T-shirt kaki. La terre noire du Haut-Karabakh est incrustée sous leurs ongles. Il est environ 17 h 30 et les interventions commencent à peine à l’hôpital civil de Stepanakert. « Les combats ont lieu durant la journée, et il faut un peu de temps avant que les blessés atteignent l’hôpital depuis la ligne de front, confie un médecin anesthésiste français d’origine arménienne, les blessés commencent à arriver dans l’après-midi, puis se succèdent toute la nuit. On termine en général au petit matin. » L’anesthésiste-réanimateur n’en est pas à sa première guerre dans cette enclave que se disputent l’Azerbaïdjan et l’Arménie depuis la fin de lénie depuis la fin de l’URSS. Dans les années 1990, il était déjà venu aidé les équipes médicales arméniennes. « À l’époque, l’hôpital de Stepanakert était vétuste, mais les blessés moins nombreux, se souvient-il. Nous sommes passés d’une guerre classique à une guerre moderne. Les blessures en témoignent. »
Via l’artillerie, c’est ainsi que s’affrontent les deux camps. Mais l’Azerbaïdjan jouit d’une supériorité technologique aérienne sans précédent grâce aux drones Harpy, fabriqués par l’entreprise publique israélienne Israël Aerospace Industries. Ces appareils « suicides » bourrés d’explosifs ont un principe d’utilisation basique : se « crasher » sur leurs cibles. Seul le bourdonnement de ces engins est perceptible par les troupes, qui ne savent jamais quand ni où ils vont tomber. Au contraire, ce bruit permanent empêche de saisir le moment critique où il faudrait se mettre à couvert. Et leur efficacité est redoutable : plus de 900 soldats arméniens ont été tués depuis le début du conflit.
Services débordés
Sous les projecteurs de la salle d’opération, un neurochirurgien ouvre la boîte crânienne du patient 57. Un éclat a traversé les deux hémisphères du jeune soldat. Les dégâts sont considérables. Le médecin, à la blouse maculée de sang, cautérise les vaisseaux un par un. Après deux heures d’intervention, l’effervescence du début laisse place à une atmosphère pesante. Dehors, les bombardements ont repris. Faut-il continuer ? Faut-il s’arrêter et laisser le jeune homme partir ? Silence. Le chirurgien décide de tout tenter. À l’écart, un médecin regrette : « On ne peut pas tous les sauver. Il va mourir, mais ce n’est pas quelque chose que l’on peut dire à un chirurgien. »
L’autre jeune volontaire, blessé plus légèrement à la tête, devrait s’en sortir. Sourire aux lèvres, Georges, étudiant en médecine originaire de Stepanakert, positive : « L’Artsakh [dénomination arménienne du Haut-Karabakh] est fort, et ce jeune aussi. On a bon espoir. » De l’espoir et de la foi, il en faut beaucoup aujourd’hui à ces Arméniens, en mauvaise posture face aux Azéris. Bakou progresse au nord et au sud, et est parvenu à couper le Haut-Karabakh de l’Iran. Trois hôpitaux ont été frappés durement. Seule une roquette Smerch, visant un centre hospitalier de la capitale, a pu être déviée la semaine dernière. Si, officiellement, les forces arméniennes résistent, officieusement, « ça ne sent pas bon », avouent civils et soldats. Parfois, la reprise d’un territoire dans le sud de la région suffit pour qu’une clameur s’échappe du couloir de l’hôpital de Stepanakert. Mais la joie est de courte durée, mise à mal par l’arrivée de plusieurs soldats grièvement blessés. Depuis quelques jours, les services de santé de la région sont débordés. Tous les soignants sont mobilisés, et ce, quelle que soit leur spécialité. Zorayr, médecin gynécologue-oncologue, s’est reconverti. Désormais, il organise les arrivées et départs des patients selon leur état. Une fois opérés et stabilisés, ils sont tous transférés vers Erevan, capitale de l’Arménie. Le trentenaire constate gravement : « En temps normal, huit anesthésistes travaillent à l’hôpital de Stepanakert mais, aujourd’hui, il nous en faut plus, car les blessures de guerre sont si lourdes que les patients doivent être profondément endormis durant l’opération. Sans l’aide des médecins français et russes qui ont rejoint l’hôpital, on ne serait pas assez nombreux pour gérer tous les blessés… »
Recrudescence du virus
Et comme si cela ne suffisait pas, un nouvel ennemi s’invite depuis peu : le coronavirus. Presque tous les soignants de l’hôpital sont malades, mais pas question pour autant de se mettre en quarantaine. Jean-Michel Ekherian, un médecin français venu aider les équipes de l’hôpital de Stepanakert, tranche : « Ici, le virus passe au second plan, il faut d’abord sauver sa peau. »
Zorayr, lui aussi venu de France, a continué ses gardes malgré la fatique. Il questionne : « Si je ne viens pas travailler parce que je suis porteur du coronavirus, alors tout le monde fera de même. Et qui soignera les blessés ? » Selon lui, la crise sanitaire, plutôt bien gérée dans le pays jusqu’à la veille du conflit, est désormais aggravée par la guerre. Le nombre de porteurs du Covid a été multiplié par cinq depuis un mois, pour atteindre aujourd’hui un peu plus de 23 000 cas positifs en Arménie. Dans la région, le jeune médecin dénombre « quatre civils décédés du Covid depuis le début de cette guerre », avant d’expliquer : « À cause des bombardements sur Stepanakert, ils n’ont pas pu venir à l’hôpital quand ils sont tombés malades. Leur état s’est aggravé, ils ont dû être envoyés à Erevan pour être pris en charge. Malheureusement, il était trop tard. »
Dans les abris antiaériens, malgré la promiscuité et les quintes de toux, personne ne porte de masque. Lusine Paronian, épidémiologiste du Centre national du contrôle et de la prévention des maladies d’Arménie, avertit pourtant : « Cet accroissement sans précédent est la conséquence du comportement des gens, et, si rien ne change, cela entraînera bientôt l’effondrement du système de santé. Il faut garder à l’esprit que nos soldats ont besoin de nos ressources de santé et nos docteurs encore plus. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour stopper la progression du virus et diminuer le nombre de cas. »
Erevan redoute de ne plus disposer d’assez de lits pour soigner les soldats transférés depuis le Haut-Karabakh. L’effort de guerre des Arméniens de l’arrière passe donc aujourd’hui par un comportement d’autoconfinement ô combien compliqué en temps de guerre, quand prime le besoin de se rassembler. Drones d’un côté, virus de l’autre, l’ennemi invisible est désormais double pour les défenseurs arméniens du Haut-Karabakh.
10. RFI, 29/10/2020
Haut-Karabakh: «Je suis chef cuisinier, mais je suis aussi un bon guerrier»
Un instructeur aide un volontaire à tirer au fusil de précision, dans le Haut-Karabakh, le 27 octobre 2020 (illustration). AP Photo
Avec nos envoyés spéciaux à Erevan, Anastasia Becchio et Richard Riffonneau
Cela fait un mois que la terrasse du restaurant de Sarkis Matevossian, avec vue imprenable sur les montagnes pelées de la région touristique de Vayots Dzor, n’a pas vu passer un seul visiteur. L’activité déjà ralentie par l’épidémie de Covid-19 est stoppée par la guerre. Une guerre que ce chef cuisinier s’apprête à rejoindre.
« Depuis un mois, je n’arrive plus à manger normalement, je ne dors pas. Chaque seconde, je pense à la guerre. C’est juste impossible de travailler. Des gens meurent là bas, comment puis-je continuer à travailler ? J’ai décidé qu’il fallait absolument que j’y aille. Mais je suis en retard. J’aurais dû déjà y être. »
« Dans notre caractère de nous défendre »
Sarkis va partir avec une petite équipe de volontaires hommes et femmes. Certains iront cuire du pain, d’autres coudrent des vestes pour les soldats. Lui ne sait pas encore ce qu’il fera sur place. « Je suis chef cuisinier, mais s’il le faut, je suis aussi un bon guerrier. Je sais tirer. »
Un mois après le déclenchement de ce nouveau conflit dans le Haut-Karabakh, l’étau se resserre autour de l'enclave séparatiste à majorité arménienne, et en particulier du corridor de Latchin, voie de passage principale avec l’Arménie. Les forces azerbaïdjanaises sont désormais à quelques kilomètres de la ville stratégique de Chouchi, de l’aveu des autorités du Haut-Karabakh. Ce jeudi, la principale ville de la région, Stepanakert a été touchée par une attaque massive de missiles pendant plusieurs heures. Des civils ont été blessés.
Malgré tout, Sarkis, comme bon nombre de ses concitoyens, ne croit pas en la défaite. « Je pense que c’est impossible. C’est dans notre caractère de nous défendre. Quoi qu’il arrive, nous allons nous défendre. Nous ne lâcherons pas. » Sarkis part en pensant à son fils. « Il a 14 ans, dit-il. Et dans quatre ans, je ne veux pas qu’il ait à faire la guerre ».
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11. Église catholique en France
29 octobre 2020
Le conflit du Haut-Karabakh : « L’Église fait corps avec le peuple arménien »
Qu’est-ce que le Haut-Karabakh ? Quelle est la genèse du conflit ?
La région du Haut-Karabakh est de la taille d’un département français. Elle fait partie de l’Arménie historique comme l’attestent ses monastères et ses églises. Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan date du début du XXe siècle. En 1921, sous l’Union des républiques socialistes soviétiques (U.R.S.S.), Joseph Staline, commissaire au Peuple des nationalités décide – par des découpages territoriaux – de détacher le Haut-Karabakh de l’Arménie pour en faire cadeau à la République Socialiste Soviétique d’Azerbaïdjan. Située dans une région géopolitiquement marquée par des frictions aux confins de l’Empire, il décide de diviser pour mieux régner et de faire un gage d’amitié à l’Azerbaïdjan turcophone, riche en pétrole et par ricochet, la Turquie kémaliste. Ses frontières nouvellement dessinées ne correspondent cependant à aucune ethnie et aucune réalité historique.
Au fil des années, l’U.R.S.S. a procédé à une lente politique de nettoyage ethnique. Les dirigeants ont poussé les habitants de ce pays pauvre et enclavé, à quitter leur patrie pour remplacer les villages arméniens par des villages azéris. Les Arméniens gardent en mémoire le cas de la province du Nakhitchevan, qui appartient aujourd’hui à l’Azerbaïdjan. Cette région avait été donnée par Joseph Staline aux Azéris ; en 1918 les Arméniens formaient près de 50 % de la population de cette région contre 0% quelques décennies plus tard…. Les Arméniens se sont promis de ne plus revivre un tel drame !
La guerre entre les deux pays a éclaté en 1988. Le conflit a fait 30.000 morts et des centaines de milliers de réfugiés. En dépit d’un cessez-le-feu signé en 1994, les accrochages armés restaient réguliers jusqu’au 27 septembre 2020, date de la reprise du conflit.
En 1988, lors de la perestroïka, l’Arménie réclame le rattachement du Haut-Karabakh. Mikhaïl Gorbatchev, à la tête de l’Union soviétique laisse pourrir la situation tandis que les autorités azerbaïdjanaises soviétiques provoquent des massacres d’Arméniens dans plusieurs villes à Soumgaït, Bakou et Kirovabad. En septembre 1991, peu avant l’effondrement du bloc soviétique, le Haut Karabagh ne pouvant pas se rattacher à l’Arménie, proclame son indépendance à l’issue d’un referendum. Un conflit éclate entre la république autoproclamée : le Haut-Karabakh et l’Azerbaïdjan. Des médiations s’opèrent depuis 1994, sous l’égide du Groupe de Minsk (l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) codirigés par la France, les Etats-Unis et la Russie. Ils n’ont pas réussi à trouver de solutions viables car il n’existe pas de compromis entre l’Azerbaïdjan qui veut récupérer ce territoire, et l’Arménie qui veut que le Haut-Karabakh obtienne un statut définitif. En l’absence d’accord, la zone entourant l’enclave et qui garantit sa sécurité et la continuité territoriale avec l’Arménie sont contrôlés par les Arméniens.
Quels sont les enjeux du conflit ?
L’Arménie se sent en danger. Elle a peur de vivre un nouveau génocide. Le mode opératoire des forces azéries est similaire à celui de 1915. Les Arméniens militent pour leur survie. Les bombardements intensifs sur des zones densément peuplées qui ont lieu depuis un mois visent essentiellement des civils avec des armes non autorisées par le droit international. L’enjeu pour les Arméniens est de faire de profiter de cette guerre pour obtenir la reconnaissance définitive de l’Artsakh (nom arménien donné au Karabagh).
Quels rôles jouent les grandes puissances dans cette guerre ?
L’Azerbaïdjan dispose d’un avantage militaire. Les Azéris ont le soutien de l’armée turque qui pousse Bakou à l’offensive mais aussi du Pakistan. Les Turcs ont recruté un millier de mercenaires de Syrie. Les forces azerbaidjanaises obligent leurs minorités (Lezguiens, Talysh…) à se battre en première ligne ce qui constitue un moyen de les affaiblir démographiquement.
L’État d’Israël intervient également aux côtés de son allié azerbaïdjanais. Les deux pays ont une vraie convergence stratégique car ils n’entretiennent pas de bonnes relations avec l’Iran, pays chiite. L’Azerbaïdjan – grâce à sa manne pétrolière – vend du pétrole à Israël et les Azéris achètent des armes à sous-munitions israéliennes et des drones qui causent des dommages considérables auprès des civils. D’ici dix ans, l’Azerbaïdjan ne pourra plus vivre de ses ressources pétrolières. Elle a intérêt à faire une guerre maintenant. C’est aussi un enjeu de politique intérieure : redorer le blason d’une dictature oppressive en « achetant la paix sociale » en menant une guerre victorieuse contre les Arméniens.
Depuis plusieurs jours, la région subit des bombardements. La cathédrale Ghazanchetsots (Saint-Sauveur) de Chouchi, joyau du patrimoine millénaire chrétien, a été frappée par un tir de roquette le 8 octobre. Elle est aujourd’hui sévèrement endommagée : large trou dans le toit, vitraux soufflés… D’autres églises ont-elles été visées ? Le patrimoine chrétien est-il menacé ?
Elles sont malheureusement ciblées de manière intensive car les forces armées azerbaidjanaises veulent annihiler la présence arménienne du Haut-Karabakh, et souhaite aussi effacer au passage toutes traces de patrimoine chrétien. En 2005, elles avaient démoli le cimetière chrétien arménien de Djoufa, joyau médiéval du patrimoine sans que ça n’émeuve grand-monde ! Ces destructions s’apparentent à des crimes de guerre.
À Erevan, l’Église arménienne apostolique soutien le peuple arménien. Elle encourage les combattants et console les civils. À Paris, le 1er octobre, les chefs religieux de la communauté arménienne de France ont rédigé une déclaration commune dans laquelle ils évoquent la situation aux frontières et appellent à la paix.