Roger Garbis Tcherpachian : vie et mort d’un homme d’exception
La cérémonie religieuse pour les obsèques de Roger Tcherpachian s'est déroulée dans une cathédrale St Jean Baptiste , comble.
Des membres de sa famille et des amis étaient venus de partout .
L'inhumation a eu lieu dans la caveau de famille , ornée d'une grande croix arménienne , avec Tcherpachian en lettres arméniennes & plus bas en caractères latins .
Il va reposer en paix totale dans cette campagne si calme qu'il a tant aimée, dans l'Eure.
Voici l'hommage de son ami Kégham Torossian :
Chère Madame Lizéta Tcherpachian, chers enfants et petits-enfants,
chers parents et amis de notre Très Cher Roger-Garbis Tcherpachian, c'est
avec une très grande tristesse et très profonde émotion que je viens, au nom
du Conseil Paroissial de Paris et de moi-même, vous présenter nos très
sincères condoléances dans l'épreuve que vous venez et que nous venons de
subir dans le rappel à Dieu de notre si cher Garbis.
L'âge aidant, je ne me souviens plus très exactement quand je l'ai
rencontré pour la première fois, il y a probablement plus de 45 ans lorsqu'il
était encore membre de l'Ugab-France et se chamaillait sur des petits
désaccords avec le président Nourhan Fringhian, grande figure disparue il y a
presque 30 ans, que j'assistais souvent.
De par ses fonctions à l'église et les miennes, nous nous sommes peu à
peu rapprochés et appréciés au fil des ans.
Il était le plus ancien membre de notre association cultuelle de l'Eglise
Apostolique Arménienne de Paris et de la Région Parisienne et fut très proche
de notre si regretté archevêque, Mgr Sérovpé Manoukian, Vanetsi comme lui.
Il a été, sans discontinuer, élu Délégué de notre assemblée cultuelle, de
1956 à 2008 et son Vice-Président de 1992 à 2005. Il a également été
Trésorier du Conseil d'Administration de 1964 à 1985 et m'a toujours soutenu
au cours de l'année difficile que 2005 fut pour notre église.
Il fut ensuite, le premier président de l'assemblée des délégués
diocésains de France, de 2007 à fin 2010 après avoir été, avec Mgr Norvan
Zakarian et quelques uns d'entre nous, un des acteurs de la création de ce
Diocèse de France dont Il avait à coeur d'assister régulièrement à toutes les
réunions de son conseil d'administration.
Il fut aussi Trésorier de l'APCAF,
l'Association Pour la Promotion de la Culture Arménienne en France, créée
en 2008 par Mgr Norvan Zakarian et c'est grâce aux contact qu'il a pu établir
à Beyrouth avec Monsieur Kévork Arabian, qu'il a su convaincre celui-ci de
devenir le bienfaiteur du collège qui porte maintenant son nom à Alfortville,
inauguré le 4 juillet 2015 et de la future école maternelle en cours
d'édification.
Il avait été déjà avec le Dr Serge Simonian, à l’origine de l’école St
Mesrob d’Alfortville ouverte en 1978. Il prit sa large part dans l'aide à
l'Arménie après le terrible tremblement de terre du 7 décembre 1988. En
1994, il avait offert la fresque triptyque peinte par Khalatian qui se trouve dans
la cour de notre église (avec les panneaux d'Avaraïr, de Mesrob Machdots et
des grandes figures du Génocide) ainsi que le Khatchkar de Charenton-le
Pont inauguré le 24/04/1996.
En avril 1995, il avait été un des délégués élus de Paris pour participer à
l'élection du futur Catholicos Երջանկայ յիշատակ, S.S. Karékine 1er et je me
souviendrai toujours de cette soirée veille d'élection à Erévan, dont il fut le
principal animateur, en présence de tous les délégués de France et de
l'ambassadrice, Son Excellence Madame France De Harthing. Il participa
activement aussi à la célébration du centenaire de notre église-cathédrale en
octobre 2004.
Soucieux du futur de notre Diocèse, il lança dès le début 2008, une
campagne de collecte de dons, ainsi que peu après de même pour l'achat de
l'église de Grenoble.
Un de ses grands regrets sera de n'avoir pas pu réaliser ce mur du
"Golgotha du clergé arménien de Turquie et de ses fidèles en 1915", sur
lequel il voulait transcrireet faire graver, un à un, la longue liste des noms de
tous les membres assassinés dans les pires conditions de déportation, du
clergé arménien, comme de leurs fidèles, rapportés par Théotig dans les
années 20, à la demande du Patriarcat arménien de Constantinople.
Nous savions qu'il était aussi bienfaiteur du Saint Siège d'Etchmiadzine
et avait offert de nouvelles cloches à la cathédrale dans les années 70,
bienfaiteur aussi de l'église-cathédrale des Saints Traducteurs de Marseille et
de très nombreuses associations arméniennes.
Je me permettrais de dire pour terminer, que plus important que ses
oeuvres qui resteront, était Garbis Tcherpachian lui-même, homme de coeur,
respecté par tous, généreux, affable, dévoué, d'une approche agréable,
rempli d'humour dans ses actions, profondément enraciné dans la langue, la
culture et l'église arménienne et de leur préservation dans la diaspora, auteur
d'articles dans le journal "Haratch" en particulier sur l'orthographe classique
arménienne, et je le verrais bien me reprocher aujourd'hui, de m'exprimer à
cet instant douloureux, en français, alors que je n'ai toujours parlé qu'en
arménien avec lui.
Grand patriote, il disait qu'il était français depuis 1925 et arménien depuis
3000 ans. Il avait rêvé très tôt, comme beaucoup d'entre nous de la première
génération d'arméniens nés en France, d'aller voir l'Arménie, la vie des
arméniens en Arménie avec le mont Ararat devant eux et fut l'un des premiers
à pouvoir y aller dans des conditions difficiles en août 1957.
Lorsque nos réunions s'allongeaient un peu trop dans la soirée, il disait
qu'il lui fallait ne pas rentrer trop tard sinon il risquait que sa fiancée ne lui
ouvre pas la porte et quelques fois, qu'à son âge, il était comme un voyageur
fatigué attendant sur le quai de la gare, que le dernier train ne l'emporte.
Il a pris ce dernier train, il ne rentrera plus le soir chez lui et nous ne le
verrons plus à l'église qu'il a tant servie.
Nous le garderons tout simplement blotti au fond de notre coeur avec
tous nos souvenirs et notre grande peine et c'est en continuant dans sa voie,
que nous serons le plus fidèle à ses constantes volontés patriotiques.
Adieu cher Garbis, Paix à votre âme avec le sentiment sincère du devoir
accompli,
Kéghma Torossian