Sur le RED CARPET ce soir, “MIA MADRE” de Nanni Moretti au 68ème Festival de Cannes 2015
John Turturro, Margherita Buy et Nanni Moretti
Équipe du film – Photocall – Mia Madre (My Mother) © FDC / Cyril Duchene
Nanni Moretti et l'ensemble de l'équipe de « Mia Madre », le nouveau long métrage du cinéaste italien après Habemus Papam, en Compétition en 2010, se sont présentés face aux journalistes pour le traditionnel exercice de la conférence de presse. L'occasion d'évoquer l'histoire d'un une réalisatrice de renom en pleine crise personnelle et créative, éreintée par un tournage calamiteux et ses visites au chevet d'une mère mourante.
SYNOPSIS
Margherita est une réalisatrice en plein tournage d’un film dont le rôle principal est tenu par un célèbre acteur américain.
À ses questionnements d’artiste engagée, se mêlent des angoisses d’ordre privé : sa mère est à l’hôpital, sa fille en pleine crise d’adolescence. Et son frère, quant à lui, se montre comme toujours irréprochable…
Margherita parviendra-t-elle à se sentir à la hauteur, dans son travail comme dans sa famille ?
ENTRETIEN AVEC NANNI MORETTI
Le personnage interprété par Margherita Buy dans MIA MADRE est-il votre double ?
Je n’ai jamais pensé interpréter moi-mêmele rôle principal de mon film. Cela fait déjà quelque temps que je ne le fais plus, et j’en suis heureux. Avant, cela m’amusait ; aujourd’hui je n’ai plus cette idée fixe de vouloir construire mon personnage film après film. J’ai toujours pensé que ce serait une femme et une réalisatrice.Et que cette femme serait jouée par Margherita Buy, pour une raison très simple : un film avec Margherita Buy comme actrice principale serameilleur qu’un film avec moien premier rôle… Elle joue beaucoup mieux que moi ! Margherita a portésur ses épaules tout le poids du travail : sur soixante-dix jours de tournage,elle n’a été absente qu’une journée – pour une scène que j’ai coupée !
On a tout de même l’impression qu’il y a beaucoup de vous dans le film…
Dans la séquence devant le cinéma de Rome, Capranichetta, durant laquelle le frère de Margherita, que j’interprète, demande à sa sœur de briser au moins un de ses deux cents schémas mentaux, c’est comme si je me parlais à moi-même. J’ai toujours pensé qu’avec le temps, je m’habituerais à puiser au plus profond de moi…Mais au contraire, plus j’avance et plus je continue ainsi, plus la sensation de malaise augmente. Ceci étant, ce n’est pas une confession. Il y a des plans, des choix, des interprétations, ce n’est pas la vie.
Comment définiriez-vous ce travail : autobiographie, autofiction ?
Le terme autofiction, je ne l’ai pas vraiment compris. Et l’autobiographie… Chaque histoire est autobiographique. Je parlais de moi quand je parlais du sentiment d’inaptitude du pape interprété par Michel Piccoli dans HABEMUS PAPAM, et aussi quand je mettais en scène les histoires personnelles ou le travail de Silvio Orlando dans LE CAÏMAN. Plus encore que de vouloir mesurer le taux d’autobiographie, ce qui compte, c’est d’avoir une approche personnelle vis-à-vis de toutes les histoires.
Comment avez-vous choisi John Turturro ?
Des réalisateurs qui ont fait beaucoup moins de films que moi n’ont aucun problème à appeler des stars internationales. Moi, je ne suis pas comme ça. Je l’ai appelé parce que je l’aimais beaucoup et il me semblait que son jeu n’était pas naturaliste. Mais aussi parce qu’on se connaissait un peu, parce qu’il avait déjà un rapport avec l’Italie – il a même tourné un beau documentaire sur la musique napolitaine : PASSIONE. John avait vu quelques-uns de mes films, ce qui me rassurait beaucoup. Je reconnais que j’aurais du mal à devoir expliquer qui je suis, ce que je veux, comment est mon cinéma… Il parle et comprend un peu l’italien. Et il est aussi réalisateur. C’est bien de travailler avec des acteurs qui sont aussi réalisateurs, c’est plus facile de se comprendre.
Quand avez-vous commencé à imaginer le scénario de MIA MADRE ?
D’habitude, je laisse passer beaucoup de temps entre mes films. J’ai besoin de mettre derrière moi l’investissement psychologique, émotionnel du film précédent. Je mets pas mal de temps à recharger mes batteries. Cette fois, dès qu’HABEMUS PAPAM est sorti, j’ai commencé à penser à ce film. J’ai commencé à écrire quand dans ma vie, les choses que je raconte dans le film venaient d’arriver. Et cela a peut-être eu une influence sur la narration.
Comment avez-vous imaginé les différents modes de narration du film, où rêve et réalité se confondent parfois ?
l est important de raconter une histoire de manière non académique, d’avoir une narration qui ne se contente pas de bien faire ses devoirs. Qui, tout en les connaissant, puisse se passer des règles du récit. Mais il est important aussi que ça résonne toujours à l’intérieur de soi, dans ce que l’on est en train de raconter. Il ne faut jamais avoir une relation banale avec la matière que l’on veut représenter. J’aimais l’idée qu’en voyant une scène, le spectateur ne comprenne pas tout de suite s’il s’agit d’un souvenir, d’un rêve ou de la réalité : tout cohabite dans le personnage de Margherita avec la même immédiateté : sa pensée, ses souvenirs, l’appréhension pour sa mère, le sentiment de ne pas être à la hauteur. Le temps de la narration du film correspond à celui de Margherita, de ses états d’âme où tout cohabite et avec le même sentiment d’urgence. Ce sentiment de ne pas être à la hauteur vis-à-vis du travail, de sa mère, de sa fille,je voulais le raconter à travers un personnage féminin.
Giula Lazzarini
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