1 Nouvel Hay Magazine

L’ile d’Akhtamar en Turquie et l’église Ste Croix sur cette île

L'église Aghtamar

L’ÉGLISE CIRCONCISE DE LA SAINTE CROIX D’AGHTAMAR

La culture c’est l’ADN d’une nation. L’extermination d’un peuple plusieurs fois millénaire pour s’approprier son héritage est voué à l’échec. L’ADN d’une nation révélera toujours son identité. En conséquence, la culture arménienne restera à jamais vivante dans la mémoire universelle.

Tout au long de l’histoire, les collectivités humaines ont vécu dans différentes contrées. Elles y ont créé leur culture, leur religion, et par conséquent des symboles qui représentent leur identité. L’UNESCO est une organisation internationale qui consacre des fonds pour rechercher et préserver le patrimoine de l’Humanité. Plusieurs fois millénaire, le peuple arménien, qui fut l’objet de bon nombre de persécutions et de massacres, a affirmé son identité dans les registres de la mémoire universelle. En Arménie, le seul vestige qui demeure de l‘époque païenne est le temple de Garni. Après avoir opté pour le christianisme comme religion d’État en 301, l’Arménie a construit des églises ; certaines reposent sur les fondations de temples païens, c’est le cas de la Sainte Église d’Etchmiadzine. L’Arménie historique a compté des milliers d’églises, de monastères, de chapelles, d’écoles et d’hôpitaux. Après le génocide de 1915, tous ces vestiges ont été détruits comme pour en effacer l’existence. La ville d’Ani que les Turcs appellent « Ane » ce qui signifie « Souviens-toi » se trouve sur l’actuel territoire de la Turquie. Ani était célèbre pour ses mille et une églises. Ancienne capitale de l’Arménie, elle fut complètement détruite.

Suite à l’anéantissement des Arméniens sur leurs terres ancestrales, leurs églises furent dans le meilleur cas reconverties en étables ou en granges. Au milieu du lac de Van, sur l’île d’Aghtamar (« Ak Damar » pour les Turcs, à savoir « la veine blanche »), les Arméniens avaient érigé au 10ème siècle une église, celle de la Sainte Croix. Cet édifice nécessitait des travaux de restauration. La Turquie les entreprit et, le 29 mars 2007, le bâtiment fut inauguré comme musée. La croix dressée sur son dôme avait été supprimée afin de ne pas donner au lieu son caractère sacré. Ainsi, la Turquie avait circoncise l’église la Sainte Croix d’Aghtamar, qui reste et demeure un symbole dans la mémoire nationale arménienne. Pour les Arméniens, il existe un nombre incalculable de vestiges qui ont subi le même sort, la même amputation, comme ces cohortes de femmes et ces jeunes filles enlevées, torturées et violées sur les routes de l’exode. Depuis 92 ans, les rescapés de ce peuple génocidé qui ont constitué partout dans le monde une diaspora ont été les témoins oculaires de la tragédie de 1915.
La Turquie ne se servirait-elle pas de l’inauguration de l’église musée de la Sainte Croix d’Aghtamar pour faire valoir aux yeux du monde son attachement aux valeurs universelles ?
La Turquie actuelle, candidate aux examens d’entrée dans l’Union européenne, a concédé quelques libertés de façade à son peuple. Après l’assassinat de Hrant Dink, plusieurs milliers de Turcs se sont réveillés pour sortir de leur engourdissement. En Asie mineure (Anatolie), des centaines de milliers d’Arméniens islamisés recherchent leurs racines, leurs ancêtres, leur passé. Le gouvernement turc ne leur mettra-t-il pas des bâtons dans les roues afin d’empêcher ceux d’entre eux qui le désireraient de se faire baptiser dans l’église de Saint Grégoire l’Illuminateur ?

Nersès Durman