IL Y A 95 ANS NAISSAIT L’ARMÉNIE SOVIÉTIQUE
Peu de peuples peuvent prétendre exister depuis plusieurs millénaires. Le peuple arménien est de ceux-là. Dans l’antiquité, le royaume d’Arménie s’étendait de l’Asie mineure à Jérusalem en passant par la Mésopotamie. L’Arménie fut le premier Etat au monde à adopter officiellement le christianisme en 301.
Les conflits et les guerres au cours des siècles suivants morcelèrent le royaume d’Arménie dont le denier roi, celui de la Petite Arménie ou Cilicie, fut le franco-arménien Léon V de Lusignan.
Les Turcs ottomans envahirent et occupèrent l’Arménie occidentale. Et c’est à Constantinople que les Arméniens accédèrent à des fonctions importantes au sein de l’administration de l’Empire ottoman.
Lors de la Grande Guerre, l’Empire ottoman, allié à l’Allemagne, mit à profit l’opportunité du conflit pour arrêter et déporter 600 notables Arméniens d’Istanbul le 24 avril 1915. Cette rafle fut le prélude du génocide des Arméniens de l’Arménie occidentale.
En octobre 1917, la Révolution russe éclatait provoquant le retrait des armées russes des régions occupées d’Anatolie orientale, d’où les Arméniens avaient disparu lors de la déportation et des massacres commis par les Turcs Ottomans à partir de 1915.
L’Empire ottoman et ses alliés allemand et autrichien furent vaincus. L’Allemagne signa l’armistice le 11 novembre 1918. Et l’Empire ottoman se recroquevilla dans la presqu’île d’Anatolie.
Le 28 mai 1918, l’Arménie déclara son indépendance qui ne dura que deux ans. Les intérêts géopolitiques divergents des Occidentaux d’une part et des Bolchéviques, d’autre part, permirent aux Turcs de mettre en application leur projet d’anéantissement de la nation arménienne.
Le génocide de 1915 emporta 1,5 millions d’Arméniens. La jeune République d’Arménie ne comptait que 850.000 âmes. Simon Vratzian écrivait dans son livre « La République d’Arménie » que « les canons turcs étaient visibles depuis Erevan. »
Conscients du risque de disparition définitive de la nation arménienne à cause des intrigues des États occidentaux, des Arméniens clairvoyants sollicitèrent l’aide de la Russie. La 11ème armée rouge pénétra en Arménie afin de stopper l’avancée des Turcs. La Seconde République d’Arménie fut proclamée le 29 novembre 1920 et entra au sein de la famille soviétique.
Début février 1921, afin d’aplanir les différends entre les pays du Caucase et la Turquie, Staline avait convoqué les représentants de ces pays à Moscou. Fraîchement constitué comme État en 1918 par les Turcs, l’Azerbaïdjan devint l’une des Républiques Socialistes Soviétiques. Cette dernière était disposée à rétrocéder à l’Arménie le Haut-Karabagh et le Nakhitchevan. Nonobstant la demande des Dachnaks de récupérer les cinq vilayets arméniens, la Turquie était prête à rendre Kars, Ardahan et Artvine, ainsi qu’un corridor près de Trébizonde afin d’assurer un accès à la Mer Noire.
Le 18 février 1921, un putsch organisé par des nostalgiques et des aventuriers arméniens renversa le gouvernement légal d’Arménie. Les putschistes envoyèrent un télégramme à Moscou pour signaler le changement de gouvernement et retirer tout mandat aux négociateurs arméniens. Ce nouveau gouvernement négocierait directement avec les Turcs. Ce fut coup de poignard dans le dos de la nation arménienne. Malheureusement aujourd’hui encore, certains continuent à célébrer ce 18 février comme une journée révolutionnaire.
Pendant 70 ans, l’Arménie soviétique vécut en paix. Malgré certains effets négatifs du régime soviétique, le pays fit un bond en avant dans les domaines économique, culturel, scientifique et sportif.
La Deuxième Guerre Mondiale contre l’Allemagne nazie vint bouleverser la vie du pays. L’Arménie fut l’une des Républiques de l’URSS à donner le plus de soldats et d’officiers proportionnellement à sa population, soit 600.000 combattants au sein de l’Armée rouge. 300.000 d’entre eux tombèrent sur les champs de bataille.
Après l’effondrement de l’URSS, l’Arménie déclara son indépendance, le 21 septembre 1991. Les profondes séquelles du tremblement de terre de 1988 n’étaient pas encore cicatrisées. Les Arméniens menaient une guerre contre l’Azerbaïdjan pour libérer le Haut-Karabagh. Ne reconnaissant pas l’Etat arménien, la Turquie lui imposa un blocus terrestre en fermant les frontières communes. Cette situation inextricable pesa sur la société arménienne, et nombre d’Arméniens quittèrent leur pays afin de chercher du travail à l’étranger.
Libéré, le Haut-Karabagh proclama son indépendance le 2 septembre 1991. Un accord de cessez-le-feu fut signé entre les autorités arméniennes et azerbaïdjanaises. Cependant les provocations quotidiennes de l’armée azerbaïdjanaise continuent depuis lors faisant un grand nombre de victimes du côté arménien.
Une politique réfléchie et équilibrée des gouvernements arméniens peut seule assurer la protection et le progrès du pays. Les aventuriers tant en Arménie qu’en diaspora représentent un risque pour l’Arménie et font le jeu de ses ennemis. Après avoir traversé autant d’épreuves tout au long de son histoire, le peuple arménien doit rester vigilant, car de nombreux périls le guettent. Et la moindre étincelle peut entraîner sa destruction totale.
Nersès DURMAN-ARABYAN Paris – Novembre 2015
République Soviétique Socialiste d’Arménie, il y a 95 ans
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