Kerovpe Ekizian de la Légion d’Orient (devenue arménienne) : Houshamadyan

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Collection Ekizian | Athènes | ODA

Notre nouvel article présente l'histoire de la famille Ekizian de Chomakhlou (Çomaklı). Le personnage principal de cette histoire familiale est Kerovpe Ekizian. Plus tard dans sa vie, Kerovpe a écrit ses mémoires, qui se concentrent spécifiquement sur ses années de service dans la Légion orientale (arménienne), lorsqu'il a pris part à des opérations militaires pendant la Première Guerre mondiale.

Après l'Armistice, Kerovpe et sa femme Srpouhi s'installèrent à Adana. En 1921, ils émigrèrent en Grèce et s'installèrent à Athènes.

Cette histoire familiale est basée en partie sur les mémoires de Kerovpe et en partie sur le témoignage de son petit-fils, Kerop Ekizian. Cet article a été préparé en collaboration avec le périodique «Armenika» d'Athènes.

L'article est traduit en anglais et en turc par Simon Beugekian et Sevan Deirmendjian, respectivement.

Voici le lien vers la page:
https://www.houshamadyan.org/oda/europe/ekizian-collection-gr.html

 

La Légion d' Orient 

Après la défaite de Gallipoli, les Alliés ont le projet de débarquer en Syrie pour défaire les Ottomans sur un autre front, pendant que les armées russes passent le Caucase et occupent le Pont. Tandis qu’il est question du côté britannique d’inspirer un soulèvement arabe, la France décide de créer le 15 novembre 1916 une Légion d’Orient, composée principalement de réfugiés arméniens fuyant les persécutions de l’armée ottomane. Les Alliés pourraient alors bénéficier d’un soutien de certaines populations locales en Cilicie et en Syrie. L’idée d’un tel corps provient du président du Conseil Aristide Briand et de François Georges-Picot, notamment après l’accord franco-arménien du 27 octobre 1916, négocié avec Boghos Nubar représentant un éventuel futur Etat arménien, tel qu’il était envisagé dans les accords Sykes-Picot du 16 mai 1916. Ce corps d’irréguliers que Georges-Picot estime au début à 6 000 hommes, servirait ainsi les intérêts français pour défaire les armées ottomanes dans un premier temps, mais surtout pour pouvoir occuper les zones françaises de l’Empire dépecé et s’établir durablement là où les intérêts britanniques pourraient concurrencer la France.

Le contexte d’un recrutement

Dès l’entrée de l’Empire ottoman des Jeunes-Turcs dans la Première Guerre mondiale, la situation humanitaire est catastrophique, notamment dans les provinces arabes : inondations à Bagdad, invasion de sauterelles en Syrie et Palestine, privations et réquisitions, créant ainsi une situation de famine dans certaines régions qui fragilise fortement les Ottomans, qui n’ont pas su gérer la catastrophe. Dès 1915 également, des centaines de milliers d’Arméniens forment de longues marches forcées en Syrie, et sont enfermés dans des camps qui se constituent à partir de la Cilicie. Des milliers d’Arméniens réfugiés sont alors dispersés en Syrie et beaucoup gagnent l’Egypte où ils sont pris en charge par les Alliés. C’est donc dans une région particulièrement fragile que s’établit, à la suite de la bataille de Gallipoli, le front entre l’Empire ottoman et les Britanniques. De par ce qu’elles vivent, les populations sont peu propices à se montrer loyales envers les Jeunes-Turcs, d’autant plus que ceux-ci n’hésitent pas à éliminer les élites syriennes et libanaises ou à entrer en conflit avec le Chérif Hussein de La Mecque, qui pour sa part rejoint les Alliés.

Quand il est question pour les Alliés de débarquer en Syrie, ils repensent à la formation de corps d’auxiliaires, comme aux Dardanelles avec des irréguliers grecs (qui se sont soldés par un échec). Finalement, l’idée d’un débarquement est abandonnée, et Briand donne la priorité à l’Armée française d’Orient aux Balkans, mais le projet d’un corps d’auxiliaires est maintenu. A l’origine, celui-ci ne devait comporter que des Arméniens, réfugiés à Port-Saïd, mais Briand propose de l’ouvrir également aux Syriens et aux Libanais. Ces soldats d’origine ottomane devaient être encadrés par des officiers français, qui bien souvent ne maîtrisaient pas leur langue. La Légion, fondée le 15 novembre 1916, devait constituer une menace suffisamment importante pour que les Ottomans ne dégarnissent pas la région du nord de la Syrie. Ainsi, le front en Palestine se retrouvait affaiblit et dans le même temps, la France disposait de troupes à l’avant-garde, au plus près des territoires lui ayant été attribués par les accords Sykes-Picot, là où ses intérêts étaient les plus présents avant la guerre : en Syrie et au Liban, mais aussi en Cilicie.

Le recrutement des légionnaires a ensuite connu un certain succès, notamment du fait de l’enthousiasme des autorités arméniennes. L’Arménie étant dans la zone d’influence française, la France promettait à ceux-là un Etat indépendant, avec notamment une Cilicie arménienne (là où se trouvait anciennement la Petite Arménie au Moyen Âge). Selon Boghos Nubar, les soldats de la Légion devaient « contribuer à la libération de leur sol natal (1) », et celle-ci était censée constituer les fondements d’une future armée arménienne. La très grande majorité de la Légion était composée d’Arméniens (réfugiés ou volontaires de la diaspora), mais aussi de Syriens et de Libanais appartenant à la diaspora (environ 500 soldats) : le consul de France à Sao Paulo décrivait ainsi en août 1916 le désir des populations syriennes et libanaises de participer aux campagnes contre les Ottomans.

L’activité de la Légion dans la guerre et l’après-guerre

Fortes de leurs sentiments anti-ottomans, ces troupes s’engagent dans la campagne de Palestine, dans une seule et unique bataille, après une période d’entraînement à Chypre ou en Egypte. Ce sont finalement six bataillons d’environ 800 volontaires (au total ils sont 5 600) qui se retrouvent sur le front et permettent aux Alliés, sous le commandement du général britannique Edmund Allenby, de gagner la bataille d’Arara (ou de Naplouse) le 19 septembre 1918 au nord de Jaffa, face aux forces germano-ottomanes commandées par Liman von Sanders. Allenby après la bataille remercie la Légion d’Orient et se dit « fier d’avoir eu un contingent arménien sous son commandement », ces Arméniens qui se seraient « brillamment battus et [auraient] joué un grand rôle dans la victoire (2) ». Après l’armistice de Moudros du 30 octobre 1918, la Légion est rapidement envoyée en « zone bleue », bientôt sous mandat français, les troupes arabes en Syrie et au Liban, les troupes arméniennes en Cilicie.

En Cilicie, la Légion d’Orient débarque en novembre-décembre 1918 à Mersine, et installe son quartier général à Adana, principale ville de la région. Le général Brémond, ancien militaire actif au Maroc puis au Hedjaz, est nommé gouverneur de la région, avant d’être remplacé par le général Dufieux, lui aussi auparavant en poste au Maroc et en Algérie. Les deux se disent connaisseurs du monde musulman et reflètent la volonté de pouvoir établir un contact proche avec les autorités locales ottomanes. En outre, les autorités françaises tentent, tout en gardant les fonctionnaires ottomans sur place, d’organiser le rapatriement des populations arméniennes en Egypte ou en Syrie avec la création d’un Service central français des rapatriements arméniens. De manière chaotique, ce dernier prend en charge les populations arméniennes, mais aussi assyro-chaldéennes, syriennes catholiques et parfois grecques et kurdes. Entre 100 000 et 150 000 Arméniens sont ainsi réinstallés en Cilicie, en dépit de l’insécurité.

Par la suite, la Légion d’Orient, devenue officiellement Légion arménienne en Cilicie à partir de 1919, forte de 4 124 hommes, s’engage dans la campagne de Cilicie, qui oppose la France aux forces kémalistes, organisées par la Grande Assemblée nationale de Turquie (GANT). La révolte aurait été déclenchée après l’agression de femmes de Mara ? par des soldats de la Légion arménienne le 1er novembre 1919. La Cilicie était particulièrement importante pour les kémalistes, du fait du dynamisme économique d’Adana et de la situation stratégique des monts Taurus. Le mouvement nationaliste turc pouvait notamment bénéficier du soutien des populations musulmanes, soulevées dans toute l’Anatolie à la suite du débarquement des forces grecques à Smyrne en mai 1919. De plus, le repeuplement opéré par les Français inquiétait les populations musulmanes dans la région, qui risquaient de se retrouver minoritaires. Elles l’ont d’ailleurs été un temps à Adana, lors de leur reflux du fait de la pression des troupes arméniennes après le déclenchement de la guerre franco-turque. Dans le même temps, les troupes arabes de la Légion étaient notamment envoyées au Liban en vue de réprimer les contestations en zones montagneuses.

source : wiki

 

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